mardi, mai 01, 2012

"Dernier vol au départ de Tegel" - 1

Afin de renouer avec la belle grande tradition littéraire de la publication romanesque en feuilleton, je vous offre le roman de ce printemps ! Trois fois par semaine, vous pourrez avancer dans la lecture de ce récit et, pourquoi pas, interagir avec le texte.

Salle du Café Einstein
Il est de ces cafés où il est permis d'aller jusqu'au fond de soi-même, de ces lieux où l'on peut basculer dans ses propres abîmes et le Café Einstein en fait partie. Cela tient certainement à la dignité du décor, de la chaise, de la table, de la banquette pratiques réhaussées de quelques boiseries discrètement  dorées. Les murs de ces lieux ont une histoire, sont plein d'histoires : les parois d'un bassin dans lequel on peut se laisser couler après l'avoir dûment rempli de ses pensées les plus sombres et les plus secrètes. On peut aussi y sourire et badiner en compagnie d'une jeune femme, ou bavarder à bâtons rompus avec des amis. Le café n'est ni trop bruyant, ni trop intime. Son rez-de-chaussée se divise en deux salles, un hall, une sorte d'alcôve et le personnel circule avec aisance et discrétion entre les convives. Pour en revenir aux pensées sombres, à cette sorte de Styx de l'inconscient tourmenté, leurs flots impétueux peuvent dévaler les pentes dépressives de la psyché d'un consommateur anodin sans risque qu'il ne bondisse subitement de sa chaise, se mette à vociférer, ne jette son verre à travers la salle, n'insulte la jeune femme qui l'accompagne ou hurle sur le personnel : le cadre du Café Einstein le réfrène et ce consommateur anodin peut in petto se dire sur le ton de la conversation les pires choses. Rien à voir avec la gentille salade existentialiste des pisse-froid des beaux quartiers; il s'agit plutôt de s'avouer sa fin prochaine, le sordide de la maladie, la douleur, les traitements si peu utiles auxquels on ne peut s'empêcher de se raccrocher. Au Café Einstein, on peut commander encore un verre de riesling en oubliant ce léger mal-être, une sorte de contracture au creux de soi. Tout en faisant la conversation, on dresse hâtivement des bilans, évoquer subrepticement quelques unes des grandes questions : Dieu, après la vie, le paradis, plus rien ? On se dit qu'on a encore le temps, qu'on n'est sûr de rien, qu'il ne faut pas céder à la panique, qu'on en a vu d'autres, qu'on en verra d'autres, qu'on ne se roule pas encore par terre mais que ça finira par arriver, avec d'affreuses angoisses et des fantômes, et des regrets.

La jeune fille remet un peu de gloss sur ses lèvres. Elle n'est pas si jeune mais son maintien souple, sa ligne, son allure lui donne un air de jeunesse. L'homme qui l'accompagne doit avoir le même âge. Il n'a pas l'air malade, pas encore, juste un rien fatigué, ce qui n'a rien d'étonnant vu l'heure et le voyage qu'il a dû faire. Un sac est posé près de lui, sous la table. L'homme papillote des yeux tout en répondant à son interlocutrice. A présent, il en est sûr, ils sont trois à la table : la femme, lui et son mal. Il cherche à le présenter ... mais ce petit trouvera bien à s'imposer. Et l'homme n'a, ce soir, pas le courage  de se laisser rassurer.

lundi, mars 19, 2012

"Le Volcan" et autre forme d'exil



C'est un texte qui commence de manière anodine, comme un roman à lire dans le train, avec une poignée de personnages un peu trop colorés, l'auteur aura voulu accrocher ses lecteurs. Passé les cinquante premières pages se dessine une fresque, terrible, composée d'individus brisés ou révoltés, en fuite en tous les cas. Klaus Mann - le fils de ... - raconte ainsi son exil par suite de l'arrivée des nazis au pouvoir. Il publiera son roman en 1939 mais il laisse entrevoir l'ampleur de la catastrophe à venir. Ce n'est pas qu'une collection de caractères, d'activistes antifascistes mais plutôt la peinture d'une époque, la lâcheté polititque des alliés, les petites compromissions de ceux qui ne se sentent pas concernés et quelques beaux moments imprégnés d'une foi que je ne connaissais pas au fils aîné du grand Thomas. Dès ce roman, Klaus ne pourra plus jamais revenir de son exil, exil intérieur, perte d'une certaine innocence, et personne ni avant, ni pendant, ni après la guerre pour rendre hommage à sa clairvoyance politique et à son appel à la résistance.


C'est une lecture que j'ai mollement entamée il y a un mois de cela et qui me subjugue à présent par sa profonde humanité, par l'empathie de son auteur pour les drames humains de la relégation, quelle que soit la guerre ou l'époque. Il y a des signes avant-coureurs, une sorte de malaise indicible. Avant même que ne commencent les combats, les victimes ont déjà sombré, subjuguées par le néant et le desespoir. Cela fait plus d'une année que, nuit après nuit, je rêve que je passe d'un hôtel à l'autre, de ville en ville, encore bien plus paumé qu'Ulysse en pleine odyssée, "Le Volcan" m'a donc interpellé.


L'exil, au sens large, représente ce moment quand l'on est forcé de quitter ce qui semblait aller de soi : habitudes, certitudes, projet en cours, lieu de vie, etc. Que l'on soit coupé de l'un ou l'autre de ces éléments, et l'ont en souffre. Les conséquences sont à court terme moins dramatiques mais la douleur est réelle. C'est ici que le lecteur peut se sentir directement concerné par "Le Volcan" et l'éventail des réactions des bannis dont il est question. A lire impérativement.

lundi, février 13, 2012

Le désert de l'amour

Ce soir, j'ai vu une très belle adaptation télévisée d'un roman de Mauriac, "Le Désert de l'amour". Emmanuelle Béart, Catherine Mouchet, Didier Bezace - des comédiens rompus aux exigences du théâtre - ont prêté leur talent à l'un des classiques de Mauriac. Je suis "tombé" sur ce film par hasard alors qu'il avait déjà débuté. Dès les premières minutes, j'ai toutefois reconnu la patte du maître : le rythme du récit, la pudeur des sentiments, les louvoiements du coeur face à la chair et le triomphe calme de l'esprit, de la vertu. J'ai tout de suite retrouvé un certain genre "fin de règne" de la bonne bourgeoisie bordelaise dans un dix-neuvième siècle qui joue les prolongations.


Le scénario ? Bête à mourir. L'amour et ses regrets, le parfum d'une jeunesse qui s'en est allée et l'incommunicabilité entre les époux, leurs attentes décalées. On est loin du baratin de la littérature qui "marche", que dis-je, qui court, galope, saute les haies et violente les règles de la grammaire. J'aurais toujours un amour indéfectible pour Mauriac et ses drames d'un autre siècle, pour sa retenue, sa pudeur et sa dignité. Et la politesse du déguisement romanesque ... Pour sûr, ça nous fait des vacances. Rien de vulgaire, pas même les "bas instincts", traités sans pathos, sous l'aspect cru de la douleur qu'ils suscitent. Et quelle syntaxe !


Avec le temps, le jeu des masques, les exigences sociales, impossible de dire le fond de sa pensée. On se tourne alors vers les caractères mauriaciens et leurs silences interdits. On est un peu moins seul et on se dit que les petits romans si lents du grand François durent encore et, parfois, permettent la réalisation d'un beau téléfilm.

samedi, janvier 28, 2012

Election au Conseil d'Etat du 11 mars prochain



Non, je ne suis pas militant socialiste, je n'ai du reste pas de couleur politique particulière; je préfère souvent les élus à leur parti. Non, le Conseil d'Etat n'a pas démérité. J'ai, soit, plus d'inclination pour certains de ses membres mais tous mériteraient d'être reconduits dans leurs charges. J'ai une pensée particulière pour feu le conseiller d'Etat Jean-Claude Mermoud, mort dans l'exercice de ses fonctions. N'oublions pas que la politique est un métier difficile qui ne ménage pas son homme (ni sa femme), toujours sur la brèche, souvent en butte à la critique.


Aujourd'hui, je prends la parole pour soutenir la candidature de Nuria Gorrite au Conseil d'Etat vaudois, une candidate socialiste, actuellement syndique de Morges et bien d'autres choses. J'invite tous les citoyens vaudois sensés à faire de même. Nuria est une femme qui a grandi dans le même quartier que moi, Préllionnaz (littéralement le Pré de la Lionne !), un quartier populaire et mixte, quelques villas familiales dans le haut, du clapier à lapins concentrationnaire au milieu, le domaine catholique de La Longeraie à l'ouest, la belle propriété des de Goumöens à l'est, là où l'on s'est mis à rêver de construire notre grand Musée Cantonal des Beaux-Arts, mais je m'égare, c'est une autre histoire. Bref, Nuria n'est pas de ces politiciennes de gauche née et grandie dans une banlieue à dentistes. On se croisait, parfois, dans la navette du BAM, une sorte de mini autobus improbable, une ligne desservie deux fois l'heure ! Et, déjà, à l'époque, Nuria avait la fibre politique, et une opinion, motivée. Elle avait treize ou quatorze ans, moi aussi. Il m'est arrivé de débattre avec elle. Nous n'étions pas d'accord. Je crois qu'elle avait raison. Elle avait des arguments plus fouillés, une vision déjà, une ligne politique et pas simplement des revendications. J'ai quitté Morges, elle y est restée et en est devenue la syndique. Je n'ai pas coupé toute relation avec ma ville natale, chaque semaine, je passe dîner chez ma mère (qui vit encore à Préllionnaz) et j'ai pu observer les heureuses transformations de la ville sous l'influence de sa syndique. Que tous ceux qui douteraient des compétences et des capacités de la candidate Gorrite se penche sur le bilan de la municipalité de Morges.


Tout comme Ada Marra, Nuria Gorrite est une "secundo", fille de l'un de ces travailleurs étrangers que l'on regardait encore un peu de biais quand j'étais enfant. Nuria aurait pu rester prisonnière d'un discours revendicatif mais elle est au-dessus de ça. Tant son parcours personnel que professionnel témoigne de sa pugnacité et de son intégrité morale. La candidate Gorrite n'avancera jamais une promesse qu'elle ne saurait tenir une fois élue ! Et, ce qui ne gâche rien, c'est une femme élégante ... Non, je n'ai pas dit élégante façon tailleur passe-partout un peu strict centre gauche ou droit. Notre candidate est de cette élégance qui prend des risques et qui pétille. Toujours pomponnée, impeccable (les armes de la droite), elle part à la bataille et ressort du combat fraîche comme un gardon, le broching parfait, à croire qu'elle est juste allée prendre le thé.


Évidemment, je ne vous avance pas là des arguments très politiques, c'est un engouement viscéral dont je vous fais part mais fiez-vous au flair de l'auteur, à la sensibilité de l'artiste, relever les petits signes de rien qui, pourtant, en disent très long. Un seul mot d'ordre, votez Nuria Gorrite ! De plus, ce qui ne gâche rien, ses deux colistiers Anne-Catherine Lyon et Pierre-Yves Maillard sont aussi d'excellents candidats.

mercredi, janvier 04, 2012

Lire "Le patient du Dr. Hirschfeld" à Berlin



Rien de mieux que d'évoquer le dernier roman de Nicolas Verdan, "Le Patient du Dr. Hirschfeld" dans la capitale allemande. Le recit se déroule parallèlement sur deux époques, dans deux villes : la Berlin de la montée du nazisme et le Tel Aviv de la construction israélienne. Le héros, Karl Fein, l'un des patients du Dr., célèbre sexologue allemand des années trente, est à la fois juif et homosexuel, double raison d'être persécuté ... Nicolas Verdan n'a pas commis un roman de plus à propos de l'horreur nazie mais un plaidoyer à la tolérance, à l'ouverture d'esprit et à la compassion. Au fil du texte, les gentils ne sont pas si gentils, les méchants ont leurs raisons et Karl Fein semble rester la victime perpétuelle du système, quel qu'il soit.


Accessoirement, Verdan nous promène dans la Berlin éternelle des cabarets et de la vie urbaine, dans l'espoir des matins nouveaux du jeune Israël, dans l'exotisme de l'Argentine germanisante. Étonnement, les régions et les époques s'imbriquent les unes dans les autres sans se "contredire" et finissent par former une mosaïque complexe et touchante au long d'un récit à valeur historique, relevé de multiples rebondissements. Il y a du suspens au coin de chaque chapitre, et milles anecdotes plaisantes : devinez quel dignitaire nazi - et je ne parle pas du général Röhm - sortait travesti faire la tournée des boîtes berlinoises et était connu sous le sobriquet de "schwarze Maria" ?


Nicolas Verdan, avec ce brillant roman, aux éditions Campiche, témoigne de l'intérêt croissant de la Suisse romande pour la culture allemande et, particulièrement, pour la lointaine Berlin. Ses milles drames, ses possibilités gigantesques, sa nonchalance et son petit genre canaille mais bon fond nous changent du propre en ordre stérile de notre bout de pays et ses atermoiements, toujours à balancer entre germanium et latinium. Pour mémoire, les éditions Zoé ont étonné le monde littéraire français avec la publication de la traduction du Matthias Zschokke, "Maurice à la poule" qui se déroule intégralement à Berlin. Zoé, Campiche, et après ? à qui le tour ?

lundi, décembre 26, 2011

Une année chez les Buddenbrook



Messe de minuit à Saint-André, petite paroisse des hauts de Lausanne présidée par le bon abbé Gabriel Pittet. Nous n'étions pas une grande foule, une cinquantaine de fidèles tout au plus, il faut dire que la chapelle est intime. Le père Pittet officiait sans servant de messe, un peu d'0rgue, un ami violoniste et l'impression d'assister au culte de minuit chez les Buddenbrook, dans le grand hall de la maison familiale de la Mengstrasse. Le Père Pittet était le prêtre responsable de la paroisse de Saint-Joseph, le quartier de Prélaz, mon logement du chemin des Clochetons, sept ans de vie et d'écriture dans ce lieu. Il m'a fait aimer "la vie en paroisse", il nous demandait même parfois à Cyril et moi-même de donner la Communion. Depuis qu'il a été attaché l'unité paroissiale de Notre Dame de l'Assomption, nous participons à sa célébration de Noël.


Nous sommes au point de l'année quand il est bon de tirer des bilans. Et j'ai passé cette année "chez les Buddenbrook", accompagné par la lecture d'auteurs allemands tels que Thomas Mann, Klaus Mann, Siegfried Lenz et Eduard von Keyserling. J'ai passé une année dans un univers agréable, délicatement mélancolique, un peu fin de règne et très marqué par le souci de "bien tenir son rôle", une façon de répondre ... comment dire ... à l'angoisse générale ? la crise ? etc. etc. etc. J'ai passé une année à voir de merveilleuses fins d'après-midi, des couchers splendides. Accessoirement, j'ai aussi acheté quelques cravates supplémentaires. Un peu à contre-courant, non ? A moins qu'il ne s'agisse de se révéler à soi-même, de construire une vie. Nous avons même des plantes vertes dans la salle à manger, notre grand appartement à Cyril et moi-même.


Il ne faut pas que j'oublie le Cercle Littéraire, quelle agréable "seconde maison", ses grands salons, sa bibliothèque, le Figaro, la Croix, des plaisirs que je dois à mon éditeur Olivier Morattel qui, avec le Pr. Jequier, m'y a coopté. Je peux aussi rajouter au bilan de cette année une très belle exposition Nolde à Bâle, une exposition Cuno Amiet à Berne, la découverte de la ville hanséatique de Stralsund et quelques belles rencontres. Pour clore mon "année allemande", je parlerai dans mon prochain billet "Du Patient du Docteur Hirschfeld", dernier roman de Nicolas Verdan.



dimanche, novembre 20, 2011

"L'enquête immobile"



Chose promise, chose due, voici mon billet sur le dernier Lador, L'Enqête immobile, un monument littéraire si tant est qu'un feu d'artifice peut être qualifié de "monument". Le synopsis, oh, le synopsis, est-ce bien nécessaire chez notre grand auteur ... ça rentre, ça sort du champs du texte sous la dictée, le verbe du narrateur-observateur-enquêteur-entomologiste de la fourmilière lausannoise et au-delà. L'enquête est un prétexte à l'évocation pertinente et grinçante de l'histoire du vingtième siècle, évocation couronnée par quelques spéculations anticipatives qui feront de notre Pierre-Yves un prophète lorsque, dans vingt ou trente ans, ce qu'il avait esquissé sera devenu réalité.


Revenons sur l'effet "feu d'artifice". Ho ! la belle verte, la belle bleue, et un bouquet, et un tableau et les phrases, les images, le style pétaradent très haut en compositions étincelantes et instantanées qui, au coin du paragraphe nous laisse aveuglés et stupéfaits, émerveillés ... Nouveau tableau, nouvelle scène et ça repart avec de nouveaux effets pour nous laisser totalement abasourdis. Et quoi d'autre après ... le bouquet final !


L'enquête immobile ne doit pas se lire d'une traite ; c'est possible mais c'est gâcher cette lecture. Il faut avancer de vingt pages en vingt pages, en début de soirée par exemple, profiter pleinement de la dimension pyrotechnique du texte, en jouir durant une vingtaine de jours. Lador ne se "bouffe" pas à temps perdu dans le train ou à l'arrêt de bus. Il nécessite des conditions de lecture minimum, comme un feu d'artifice ne se tire pas en pleine tempête hivernale ou sous une pluie orageuse.


L'Enquête immobile, 383 p., Ed. Olivier Morattel, 2011

vendredi, octobre 21, 2011

1984/Chess




Un voyage, une ville anglophone à une dizaine d'heures de vol, downtown, l'agitation, des grattes-ciel, de l'ennui aussi ... Passons. Un magnifique musée des Beaux-Arts mais, surtout, un retour sur mes rêves adolescents et mes projections de vie urbaine, de modernité, d'avenir en costumes croisés pastel. Et la vie nocturne, entre dandy et mauvais garçon à écumer boîtes et bars. Ma pauvre petite Lausanne, et même Paris. Si j'avais pu connaître alors ma Berlin ! Quoqu'elle m'eût paru quelque peu trop crasseuse, pas assez glam', toc, chic, plastic, vinyl, Jean-Paul Gaultier, sexy, mondaine.



Dans cette grande ville anglo-saxonne, le temps d'une représentation, la comédie musicale "Chess", tout m'est revenu. Je me suis souvenu alors du confort d'un monde bi-polaire et fort simple, de l'évidence de la jeunesse, de la connotation positive de l'avenir et toutes les belles promesses dont tout le monde était encore bercé à la fin des eighties'. "Chess" mêlait une intrigue amoureuse tarabiscotée, des questions d'honneur mal-placé, les dernières passes d'arme de la guerre froide et une certaine vision de la compétition. Je m'y perds un peu. Et, comme tout le monde, je retiens le tube de cette production "One night in Bangcock" de Murray Head.



Durant toute la représentation, j'avais dans les narines les notes du parfum "Jazz", d'Yves Saint Laurent et comme un arrière-goût de "avant c'était mieux". Il m'a fallu attendre le final et la standing ovation pour qu'une lumineuse pensée me traverse l'esprit, à la limite du sophisme. Partant du fait qu'avant c'était mieux et que "Chess" est actuellement produite, on ne peut qu'en déduire un iatus. Soit ce n'était pas "avant", soit ce n'était pas "mieux". "Mieux" ne pouvant s'exprimer que postérieurement à un état antécédent et la comédie musicale étant à l'affiche en ce moment, il s'agit alors de "maintenant" qui devrait être mieux que l'époque de la création de "Chess" ! Toutefois, il serait hardi de dévaloriser la version d'origine par rapport à sa réadaptation, donc "maintenant, c'est bien", cqfd, même si je n'ai plus ni seize, ni dix-huit, ni vingt ans !

samedi, octobre 08, 2011

Nous sommes tous des "Princesses".



Pierre Yves Lador, grand auteur vaudois qui m'honore de son amitié, lors de la présentation de son dernier roman, L'Enquête immobile, aux éditions Olivier Morattel, en plus d'une plaisante dédicace m'a offert quelques volumes du comte Eduard von Keyserling. Je me suis donc plongé dans l'Enquête immobile, que je réserve à ma lecture domestique (je lui réserve aussi mon prochain billet). Dans mes promenades ou le train, je lis l'un ou l'autre des Keyserling. Difficile de ne pas être touché par la délicate douleur de ces pages, par cette mélancolie illuminée. Je pense tout particulièrement à "Princesses", tout le carcan délicatement contraignant des conventions, de "ce qu'il faut faire pour tenir sa place" sous un ciel merveilleux, immense, parmi les lambris de belles demeures. Du "bonheur" d'être malheureux dans la soie ...


Keyserling ne nous raconte pas des histoires compassées de princesses d'antan; il nous parle de notre existence et de tout ce que nous acceptons par convenance et qui nous éloigne de notre bonheur. Soit, on nous raconte que l'on "construit" sa vie ... cela fait beaucoup de guillemets, autant de voiles pudiques sur les mensonges que l'on se force à accepter. Où est passé le franc soleil de nos vies, le rire et la liberté ? Ne vaudrait-il pas mieux sombrer dans un authentique malheur, comme Job, plutôt que de devoir boire à petites lampées une coupe de fiel mêlée de beaucoup de sirop, pour faire passer le goût. Au final, on en vient à haïr le sirop.


Les usages - dévoyés - nous tuent plus sûrement que les traits de nos ennemis. Et notre souffle est gaspillé en formules creuses, en paroles vaines ... Keyserling ou le crépuscule des princesses, une belle métaphore de l'état actuel auquel les tenants de la culture (je ne pense pas ici à ceux qui s'affichent dans les pages people de la presse tout venant mais à ceux qui nourrissent le coeur, les sens et la tête de leur public), donc l'état auquel les tenants de la culture et les gens éduqués sont réduits : une faillite annoncée ...


Il faudrait ... tant de choses mais la saison est trop avancée et le soleil décline à l'horizon. Nous allons donc mourir poliment.

dimanche, août 21, 2011

Lieber Deutschland





De Constance à Münich, chère Allemagne, si diverse, pays de Cocagne dans lequel je séjourne avec tant de plaisir. J'ai assisté à une fort belle messe à la Dreifaltigkeit Kirche de Constance, un vendredi à midi. J'ai aussi passé de belles soirée, à travailler à la terrasse de cafés, le Wessenberg, et un autre établissement, derrière Sankt Stefan. On écrit bien dans cette atmosphère, de jolies promenades aussi.



J'avance dans la lecture passionnante du Dr. Faustus, de Thomas Mann, évidemment. Six cents pages sur l'essence de la nature allemande, sur la volonté de cette grande nation à "percer" parmi les nations du monde. C'est aussi un essai sur la douleur, la mélancolie, le sacerdoce de la création. Face au marasme économique et identitaire de l'Europe Unie, l'Allemagne représente un modèle, voire même le salut de cette Europe, comme elle le fut du temps du Saint Empire romain germanique.



On me rétorquerait que l'Allemagne est aussi à la traîne, déficit budgétaire, chômage, etc. mais les solutions qu'elle peut nous apporter ne sont pas d'ordre économique. Ce sont des réponses culturelles aux questions que la crise a soulevées. Il est impératif de commencer par se plonger dans l'oeuvre de Thomas Mann.

jeudi, juillet 21, 2011

Une autre cité hanséatique



Deux jours à Stralsund, sur la Baltique, en compagnie du "Dr. Faustus" de Thomas Mann, un petit crochet balnéaire au milieu de mon séjour berlinois. J'y ai découvert deux merveilleuses églises gothiques de briques, d'immenses édifice qui évoquent une atmosphère très "Caspar David Friedrich". Depuis ma chambre d'hôtel, j'ai une merveilleuse vue sur l'une d'elles, St Marien. De plus, les protestants d'ici laissent leurs églises pleines d'images de saints, de papes, d'évêques; et la vierge aussi, entourée de saint Pierre et saint Jean, courronnée par le Père et le Fils (St. Marien, retable du maître autel, voir photo), jusqu'à une petite chapelle lattérale de St Nicolai (l'autre des des deux) proposant au fidèle de brûler un cierge en l'honner de la Mère de Dieu, avec prière assortie. Lorsque je me suis enquis de la pratique religieuse des réformés de ce coin d'Allemagne, on m'a raconté la très jolie histoire des fidèles qui, en 1525, ont caché les images de saints, de Vierges, tout ce qui eût été voué à la destruction anti-papiste et l'ont ramené petit à petit une fois la vague protestante retombée. Et le guide de conclure que, d'ici cinquante ans, on en aura fini avec ces histoires de division !

Ce soir, j'ai assisté à un concert d'orgue (un instrument géant du mi-XIXème, le plus grand en Allemagne construit par Buchholz) à St Nicolai. J'ai trouvé dans cette église ma quatrième merveille du monde (après les Jardins Boboli , le Taj Mahal et le Zwinger Palast, dans leur ordre chronologique de découverte). Les Stralsunder ont veillé sur ce lieu de culte génération après génération et ses tours les ont protégés. Entre ses murs, on sent, physiquement, la présence de la foi, d'un grand respect pour ses mystères et d'une infinie pureté. J'ai connu un épisode extatique durant l'interprétation d'un canon, op. 56, 4 de Schummann.

Un dernier mot sur ma visite à l'Alte Nationalgalerie, à Berlin. En ce moment y est présentée la collection du banquier Wagener (1782-1861), une collection marquée du sceau du romantisme allemand. Des Schinkel, des Friedrich, la découverte de l'école de Düsseldorf, et d'un outsider : Frédéric Frégevize (un peintre genevois entre Sablet et Calame). Et un tout dernier mot sur le ravissant parc du château de Friedrichsfelde, le château et le Tierpark.



mardi, juillet 12, 2011

Berlin, le temps qui passe et moi




Comme à chaque été, je suis retourné chez moi, à Berlin. Toutefois, je ne goûte plus un certain est, envahi de stupides hordes de touristes, de l'abruti en chlapettes incapable d'aligner trois mots en allemand. C'est peut-être un effet de l'âge, je trouve Friedrichshain, Mitte et Prenzlauerberg d'une crasse physique et morale poisseuse. Ajoutez à cela l'enfer d'une certaine jeunesse décervelée, sale et pauvre ... et intolérante. Ces masses touristiques - néanmoins jamais fauchées pour la bière en litrons - ont réussi à chasser les vrais poivrots et clodos des arrondissements susmentionnés. Je me suis donc réfugié à Charlottenbourg-Wilmersdorf. Je fais quelques incursions au nord de Schöneberg (surtout pas Nollendorf) et assiste à la messe à Sankt-Edwige. Je me rends avec plaisir à Lichtenberg aussi; bref, partout où l'on ne voit pas de troupeaux vacanciers.

Accessoirement, je lis "Maurice à la poule"; Zschokke a tout compris de la paresse dans laquelle tout individu s'enfonce lorsqu'il s'installe dans cette ville. Comme le dit l'adage : "vous n'avez pas de formation, pas de travail, pas d'envie, pas d'idées, venez donc à Berlin !" Et tout finit par (s') échouer sur les trottoirs de cette capitale construite sur du sable.

dimanche, mai 15, 2011

B ... Barcelone ... Besançon




Petit retour sur mon séjour à Barcelone, sur mes véritables motivations dans ce voyage. J'y suis retourné pour Mauri, le restaurant-salon de thé au coin de la ramblas de Catalunya et carrer de Provença, fondé en 1929. J'y suis allé déjeuné, sous ses plafonds peints et ses boiseries Art Nouveau, j'y ai retrouvé ses pâtisseries tout aussi chantournées. J'ai pris le menu, avec entrée, plat et dessert, et le vin de la maison dont on vous apporte une bouteille. Le prix est le même que l'on boive un, deux, trois, quatre verres ... Et la boutique Muji n'était pas loin, y racheter l'un de ces petits calepins au format d'un passeport. Je suis aussi allé revoir quelques bonnes toiles des mes "impressionnistes" catalans, Rusiñol et Casas au MNAC. Finalement, je ne m'échape pas de mon univers de vieille fille ...
Je ne sors pas de mes villes en B. non plus. Le week-end passé, nous sommes allés à Besançon avec Cy, la belle architecture de Vauban, exactement l'atmosphère de "bonne ville" que j'affectionne tant. Un bon musée des Beaux-Arts et de l'archéologie, la messe à Saint-Pierre et nous avons même trouvé un établissement gay, très province, avec un jeune serveur court vêtu qui se dandinait sur le bar.
Je ne voyage pas par goût de l'exotisme, je collectionne des épisodes de ma vie idéale et surannée, une existence protégée par le rempart des bons auteurs. J'emmènerai du Crevel et du Thomas Mann lors de mon prochain séjour berlinois.

mercredi, avril 27, 2011

Les trop riches heures de Barcelone



Quelques jours à Barcelone, ville que je connais bien et que j'apprécie ... appréciais. L'insolente santé économique de la communauté autonome de Catalogne parmi une Espagne exsangue a refermé Barça sur un certain complexe de supériorité. La grande cité, sainte capitale de la culture catalane, n'a plus qu'elle-même comme modèle. Elle en devient idiote et commence à sentir moralement le moisi. Le musée d'Art contemporain n'offre plus que deux de ses trois étages à la visite, dont l'un est consacré aux collections (d'artistes locaux) que possède l'institution. Et les autorités municipales ont quasi éradiqué tous les signes restant de la guerre civile. Des chantiers chic et sans fin ceinturent la ville qui n'en finit pas de s'alourdir de frisottis architecturaux réhabilités selon une esthétique ripolino-disneyique. C'est tout juste si l'on a pas forcé les vieilles gagneuses de Raval de subir lifting et liposuccion.


Le touriste est contraint au rôle de crétin de touriste que l'on fait poireauter devant le tas de nouilles trop cuites de la Sagrada Familia ... Heureusement, il reste de vrais gens, ceux qui n'ont jamais fréquenté le musée d'Art contemporain ni ne prennent la pose sur la plage artificielle de San Sebastian, de ceux qui assistent à la messe de San Augustin ou qui épluchent des légumes devant leur porte, parmi les rues basses de la Barcelonette.

samedi, avril 23, 2011

Vendredi Saint



Célébration du Vendredi Saint à l'abbaye de Saint-Maurice où je reçus la confirmation dans la chapelle des Martyrs il y a une quinzaine d'années. J'y suis allé avec Cy. puis nous avons dîné à Martigny. Etonnant Valais si proche et pourtant ... étranger. La place centrale de Martigny ne ressemble à aucune place vaudoise, ni bernoise, fribourgeoise ou neuchâteloise. L'architecture, l'urbanisme, une certaine saveur de l'air marquent une différence notable. Jusqu'à une caissière qui devisait avec un client en patois ! Ce n'est ni plus, ni moins, c'est autre, dépaysant.

J'ai passé le dimanche des Rameaux à Bâle, j'y ai ressenti moins "d'exotisme". Nos cartes, nos frontières et autres délimitations se mettent à mentir ou répondent à des logiques obsolètes. Je n'en reviens toujours pas d'un voyage à Vienne sans avoir à aucun moment produit une pièce d'identité officielle ! Inutile d'ajouter que je me sens moins "autre" à Vienne ou Bâle qu'à Martigny.

Pâques nous apportera-t-il la promesse d'une moins grande distance avec le Ciel ?! Du moment que j'avance d'ici à la fin des vacances dans "Un après-midi d'été couvert", ce roman sur le thème de la déréliction me pèse, il m'use et réveille plus d'un abandon en moi.

vendredi, avril 15, 2011

Hôtel Balmoral


Non, je n'ai pas quitté le navire ! que mes lecteurs de C., petit village vaudois où vécut Mme de S. se rassurent et les autres aussi. Je n'ai pas le don d'ubiquité et me suis retrouvé dès début mars dans les cartons. J'ai déménagé. Berlin ? Bordeaux ? Barcelone ? Zürich ? non, je suis juste passé du quartier de Prélaz à sous-gare. Moi qui n'ai de cesse d'aller nuit après nuit en songe d'un hôtel à l'autre, je me suis installé à l'hôtel Balmoral, à l'ex-hôtel Balmoral, un bel édifice du début du XXème siècle reconvertit en immeuble d'habitation.

Ce n'était pas qu'un déménagement; j'ai tourné une page. J'ai produit tant de textes aux Clochetons, tant de récits ... Le lieu était épuisé. La dernière fois que j'y suis passé, état des lieux manqué, le propriétaire s'est fait excuser, il y avait un air de piano qui descendait dans la cage d'escaliers, des exercices relativement adroits, une variation passant du classique au jazzy. J'ai observé avec étonnement les murs, nus, les pièces vides, sordides à la limite, devenues si étroites. J'étais incapable de reconnaître mon ancien logement.

A l'hôtel Balmoral, j'occupe la moitié du dernier étage de l'aile gauche, trois fenêtres en façade et une sur le côté. Un cabinet, une chambre, un immense séjour - la cuisine en dépendance - et la salle de bain au bout d'un large couloir, une véritable antichambre carrelée avec goût. J'ai la vue plein ouest, une rangée de bâtiments Art Déco tardifs en vis-à-vis. La nuit, pas un bruit, à part la sonnerie bien timbrée de l'horloge tous les quarts d'heure qui roule sous les trois mètres de plafond stuqué.

mardi, mars 01, 2011

Je suis venu vous dire ...

Je reviens, non en bloggeur capricieux en manque de reconnaissance mais en auteur responsable, prêt à assumer le regard qu'il porte sur la cité et ceux que l'on y rencontre. François Mauriac, Julien Green et Thomas Mann n'ont pas fait autrement. Mes lecteurs comprendront le parallèle, mes détracteurs ... Oh! je ne suis pas encore assez installé pour en avoir.

Il se trouve que je passe mes vacances à Lausanne; je traverse la ville, je lis la presse, scrute les façades comme un touriste. Je cherche les correspondances de transport public, essaie de débusquer une rue ou l'autre; l'exercice est amusant. De plus, j'ai mille courses à faire, qui m'entraînent de Prilly à Lutry, et jusque dans l'improbable chemin du Trabandan. Aujourd'hui, j'ai traversé des perspectives, des avenues, des boulevards au charme discret, au prestige encore plus discret. C'est une vie qui s'y déploie et dont j'avais oublié l'expression si particulière, comme une vieille connaissance qui n'a pas si mal tourné. Je n'ai pas si mal vieilli non plus. Reprendre là où on en était resté.


Je suis resté interdit par le traitement accordé, dans la presse, à un événement tragi-comique, les coups de feu gratuit d'un homme sur une représentante de la police par simple détestation. Le tireur a, soit, un problème mais, plus globalement, notre société a un problème ! Comment la force publique en est arrivée à être détestée au point qu'un quidam, de sang froid, cherche à blesser l'un de ses membres. Je m'interroge parmi l'étrange lumière de ce jour, de brume, d'or et d'argent. Je m'interroge dans la séduction de ce printemps à venir.

vendredi, décembre 31, 2010

5-4-3-2-1 Ignition

Bilan 2010, exercice classique dont les chefs d'Etat se sortent avec plus ou moins de bonheur, d'Adolf Oggi et son sapin à Jacques Chirac et son horloge à voeux ... Allons-y, cher lecteur, pour ce passage en revue de l'année écoulée. Je vais procéder de manière thématique plutôt que chronologique.

Commençons par les voyages, d'un week-end ou plus. J'ai bien passé cinq ou six semaines à Berlin ... mais ce n'est pas du voyage, j'y suis chez moi. Dans ma chère Allemagne, j'ai renforcé mon attachement au Bodenseekreis. Avec Cy, nous avons séjourné à Constance, Friedrichshafen, Saint-Gall, Bregenz. Cette région à cheval sur trois frontières est pleine de charme. On y mène une vie plaisante, discrète, confortable et aimable. Nous avons poussé un peu plus loin à Stuttgart, une belle cité commerciale, sa gare monumentale d'un style un rien fasciste, la grande avenue bordée de commerces, le château, son petit parc, le Kunstmuseum et cette bonne vie opulente qui s'offre à chaque terrasse, dans chaque café, dans les rues, les places. Je suis aussi allé "redécouvrir" Münich en solitaire (j'y suis passé il y a plus de quinze ans), la ville de l'adolescence de Thomas Mann, de ses premiers succès. On y trouve de beaux cafés. Je retiens particulièrement le Hermann, à l'étage, en face de l'hôtel de ville, et le Puck, près de la neue Pinakothek. J'ai aussi découvert Malte avec Cy, un pauvre caillou recouvert de vieilles briques où l'on fait payer les catholiques pour visiter les églises. Le tourisme fait vivre l'île et la tuera certainement ... Autre destination touristique, la côte dalmate en Croatie. Je garde depuis que nous y sommes allés quelques impressions, quelques images de Hvar, sur l'île du même nom, et le fabuleux palais de Dioclétien à Split, les quais, la villa Mestrovic. Nous avons encore passé quelques jours à Lyon et Zürich.
En matière d'art, j'ai fort goûté une belle exposition Vallotton au salon du livre de Genève, particulièrement un "Paysage, soleil couchant" de 1919, un horizon de feu, d'or, de turquoise, de rose, beauté indescriptible de la mélancolie du couchant, arbres et bosquets, et les promesses de l'enfance. Beau à pleurer. Il y a aussi ma visite de la Neue Pinakothek, pas envie de citer une toile en particulier. Tout comme le Staatmuseum de Stuttgart. De belles institutions.

Question littérature, 2010 sera l'année de ma rencontre avec Julien Green, Léviathan, Adrienne Mesurat, son journal ... Quel choc ! J'ai lu Adrienne en pleine canicule berlinoise et j'en suis resté frappé, interdit. J'ai terminé l'année sur la lecture des Buddenbrook, un nouveau choc. J'ai approfondi ma relation à François Mauriac, Un Adolescent d'autrefois, Le Baiser aux lépreux et une bonne biographie que je n'ai pas terminée.
Quant à ma "production", j'ai fait publier Les Âmes galantes en mai et, fin novembre, les Mémoires d'un révolutionnaire. J'ai surtout mis la dernière main à La nouvelle Fuite à Varennes. J'attends les propositions de correction de mon éditeur. J'ai aussi achevé la rédaction de deux brefs textes qui m'ont beaucoup tenu à coeur, Slideshow (impubliable car fondamentalement scandaleux et amoral) et Tous les Etats de la mélancolie bourgeoise, un petit essai pertinent un rien fielleux.

Je n'ai manqué qu'une ou deux messes dominicales mais aucun des grands rendez-vous liturgiques de l'année. Je suis allé d'un paroisse à l'autre, toujours dans le regret de ce que j'avais connu à Saint-Joseph. En 2012, je compte me rapprocher de la paroisse Saint-André, y retrouver l'abbé Pittet.

Un dernier mot, de cinéma; il y a eu la révélation esthétique et artistique d'un Single man de Tom Ford. Je n'entrerais pas dans le détail, je vous laisse regarder dans les billets de cette année. Un coup de projecteur sur Io sono l'amore, de Luca Guadagnino, une tragédie wagnérienne dans un Milan post-mussolinien. Tilda Swinton y est sublime.

Et quant à ce blog ? Stop ou encore ? Mon éditeur et les journalistes me forcent la main. On m'a collé une étiquette de blogueur. Je voulais mettre un terme à cette aventure; vais-je revenir sur ma décision ?

jeudi, décembre 30, 2010

6. "Le Nom des gens"


Un film, un film français, une friandise, un bonbon acidulé, une perle, un petit rien d'une élégance incongrue de Michel Leclerc. Il m'est souvenu ma période française, quand je n'avais d'yeux que pour Paris et le "miracle mitterrandien". C'était il y a longtemps ... C'était quand j'avais vingt ans. Tout le monde était persuadé que les matins clairs commenceraient à se lever sur la Ville Lumière, sur la France.

"Le Nom des gens" donne envie de voter socialiste, de croire au modèle républicain, au joyeux métissage black-blanc-beur autour d'un coup de rouge. Bahia Benmahmoud (Sara Forestier) est une jeune fille délurée, touchante et désinhibée. Un peu folle ... Arthur Martin (Jacques Gamblin) est son parfait contraire et comme tout le monde le sait, les contraires s'attirent. Le scénario est un habile prétexte à une galerie de portraits et une collection de situations cocasses. Bahia nue dans le métro - elle a oublié de passer un vêtement - reluquée par un musulman traditionaliste (ça, aussi, se voit à la tenue). Bahia ne trouve qu'à lui répondre "bon, ben ça suffit, t'as jamais vu une femme à poil ?".

En gros, "les origines, on s'en fout" et quelque soit le tragique du parcours de chacun, ce n'est pas une raison pour se faire la tête, la guerre, se détester. Il y aura toujours une table à laquelle s'asseoir, un repas à partager, une bouteille à ouvrir ... La belle fraternité ! que je n'ai jamais rencontrée ni au POP (j'ai été membre de ce parti), ni dans le milieu gay (j'ai aussi fréquenté cette chapelle-là) mais que je retrouve à chaque fois que je fréquente "notre sainte mère l'Eglise" ! La messe est bien le seul instant, le seul lieu (la manifestation spatio-temporelle de la communauté catholique) où l'on ne m'a pas fait sentir que j'étais soit trop ceci, soit pas assez cela !

P.S. Avec Cy, mon homme, nous avons assisté à une très belle veillée de Noël à Saint-André.

vendredi, décembre 17, 2010

7. Tony, Thomas, Christian et les autres


Tony, Thomas, Christian et les autres ... Buddenbrook évidemment ! En ce momement, en ce temps de l'Avent, je partage mon temps de loisir entre la promotion des "Mémoires d'un révolutionnaire", la lecture du Pentateuque (Genèse, Exode, Lévitique, Livre des nombres, Deutéronome) et les Buddenbrook, effets du hasard. Ce sont deux lectures que j'ai longtemps repoussées. Les deux sont "impressionnantes". L'Ancien Testament brille de l'éclat baroque d'un or ancien et les Buddenbrook, un récit familial d'un veine quasi biblique, quelle peinture édifiante et sensible !

Je retrouve à travers le personnage du sénateur Thomas Buddenbrook toute la démission d'une nature insatisfaite et hésitante, un trait contre lequel je passe beaucoup de temps à me défendre, tout comme le sus-désigné personnage. Il y a aussi la notion du masque ... Au risque de déplaire et de me faire chapitrer par quelque autorité, je préfère paraître toujours au plus près de moi. Je pourrais encore évoquer l'hypersensibilité de Christian, la dignité de Tony, ses à prioris enfantins et sa patience face aux contradictions de la vie. Je suis les Buddenbrook.

J'ai coutume de dire en interview que j'aurais aimé jouer les Thomas Mann mais que, ne provenant pas d'un milieu suffisamment bourgeois, je me suis rabattu sur Thomas Bernahrd ! Derrière le bon mot, je conserve toutefois la nostalgie de cette bonne vie allemande qui m'attire tant et m'appelle depuis ma rencontre avec Berlin.

dimanche, décembre 05, 2010

8. Chez les Buddenbrook

Enfant, je me rappelle avoir été fasciné par une série télévisée, l'histoire d'une famille allemande au XIXème siècle. Je n'entrais pas encore dans les méandres et les enjeux du récit mais j'en gardai une sorte de connaissance intuitive, une collection d'impressions, de sensations très prenantes. Adolescent, mon père m'emmenait parfois en voiture au collège de l'Elysée - j'ai fait la "primsup" puis une année de "rac" au collège de l'Elysée. Nous passions devant un bon bâtiment très "dix-neuvième-siéclard" que je surnommais la "Buddenbrookshaus" ...

Lorsque, simultanément à Berlin, je connus Thomas Mann, il me souvint la fameuse série télé. Je ne fis pas immédiatement le lien; je ne connaissais rien de l'oeuvre de l'intéressé. Depuis, j'ai lu du Heinrich, du Klaus, des biographies, du Golo, du Erika et, enfin, du Thomas ! Les Buddenbrook, déclin d'une famille. Ce récit n'a rien de monstrueux, le genre de pavé-pensum que l'on traîne des mois durant. Je suis entré dans le récit comme je suivrais mes histoires de famille (élargie). C'est avec un certain effroi que je découvre que des principes bourgeois surannés guident encore tant les moeurs contemporaines. Je ne parle pas de tempérance, de retenue, de bonne vie mais de ce souci panique du "qu'en dira-t-on". Le couple est le lieu de la réalisation sociale et de l'accession à un certain niveau matériel, y compris le couple gay ... surtout le couple gay ! Aujourd'hui, Antonie Buddenbrook serait un jeune homme passant d'un mauvais pacs à l'autre.

vendredi, novembre 26, 2010

9. Laharpe, héros méconnu

Laharpe ou l'histoire d'un homme insoumis, insurgé, un peu orgueilleux et parfois de mauvaise foi ... Laharpe ou le héros méconnu. J'ai passé ses "pantoufles" et ai rédigé ses confessions en "je", un constat de fin de vie qu'il aurait rédigé fin 1837, début 1838. Je laisse le soin à mes lecteurs de se faire une idée, lire les "Mémoires d'un révolutionnaire". Ils peuvent aller glâner des informations sur le site et la page "facebook" des éditions Morattel.
Le travail de promotion a cela d'étrange qu'il faut se remettre en phase avec le texte, un texte "accouché", le travail serait terminé. Je relis l'un ou l'autre passage des "Mémoires ..." et me surprend à le ... découvrir. Le texte est sorti de moi, il vit sa vie et je le lis comme je lirai n'importe quel texte qui ne serait pas de moi. Les "Mémoires ..." ont été relus, corrigés, mis en forme et imprimé, tant d'autres les ont portés; à présent, ils sont aux lecteurs.

Agréable interview vendredi matin, sur Couleur 3, menée par Catherine Fattebert. Les trottoirs de la Sallaz étaient encore un peu enneigés, une belle lumière rase, un temps d'Avent ... Le rendez-vous n'avait rien d'inquiétant. Je me suis demandé si je percevais le paysage différemment, à présent que je le perçois avec les yeux d'un auteur "reconnu". Mes précédentes sorties ont toutes été si discrètes que j'avais à peine l'impression à mes propres yeux d'être écrivain !

jeudi, novembre 18, 2010

10. Potiche et autres nids à poussière


On n'en finit pas de vivre avec son passé ... L'autre jour, je suis allé voir "Potiche", le dernier film de François Ozon, avec Catherine Deneuve. Je suis allé le voir pour la grande Catherine, un peu trop étroitement sanglée dans sa gaine, le souffle court, la réplique parfois hésitante, grand paquebot du cinéma français ... une légende toujours sur le point de prendre l'eau de partout mais ça flotte encore.

J'y ai retrouvé une esthétique, un charme propre à mon enfance, le chic du skaï crème, les couleurs acidulées et un ton, une vision du monde qui confine à la non-vision ... Ah ! le charme d'antan, quand on pouvait cloper, forniquer et polluer sans arrière-pensée. On jouait à la vie en laissant l'avenir régler les vrais problèmes.

Je vous écris - évidemment - planté derrière la télévision. Et je regarde une émission sur la pop et les stars des années quatre-vingts, du "cheni" fluo qui a aussi mal vieilli que ma madone de plastic phosphorescent achetée par correspondance chez Védia, mon premier objet de piété ! De la bimbloterie à laquelle je ... nous restons tous attachés. On ne peut tout de même jeter de pareilles choses, ce serait se couper un bout de l'âme.

D'une certaine manière, les "Mémoires d'un révolutionnaire", les confessions de mon Laharpe tiennent du même fétichisme passéiste, le kitsch en moins. La promotion de mon dernier roman a déjà commencé, vernissage le 23 novembre de 18h30 à 21h30 au café le Sycomore à Lausanne, 31 rue de l'Ale. Olivier Morattel est un éditeur très actif et efficace. Il vient de la finance, il sait vendre "le produit" et j'aime cela. Il a ma totale confiance. Petit rappel de la teneur de mon dernier roman dans mon prochain billet.

vendredi, octobre 29, 2010

11. On ne change pas ...


... une équipe qui gagne surtout quand elle perd ! Je vais donc encore parler de Berlin - où je me trouve - je vais encore évoquer Mauriac, Green, Thomas Mann et Bernhard et mon catholicisme, je vais "tirer" un message de plus afin d'honorer ma promesse comme un époux honore son épouse après vingt ans d'épousailles et de routine. Je baille ... non, je ne suis pas fatigué, je m'ennuie, voici un mot que lâchait Lucien Guitry lorsqu'il baillait en public. Je le sortais aux aspirantes infirmières dont j'avais la charge, des élèves d'une école de soins infirmiers (une école privée et pathétique dont la direction est frappée d'alcoolisme) mais les demoiselles manquaient d'humour et ont répété au seul membre non-alcoolisé de la direction que je m'ennuyais. C'était une dame qui ne supportait les hommes qu'émasculés et/ou alcooliques ... ça laisse songeur et qui, de nos jours, connaît encore Lucien Guitry. Bref. Je peux me perdre rêveusement dans la contemplation de la vue (voir illustration) que m'offre la vaste baie vitrée de l'appartement que j'ai loué pour ce séjour, un grand appartement décoré avec goût dans lequel je flotte au-dessus de la ville qui s'offre à moi sur près de trois-cents degrés.

A propos de Mauriac, mea culpa, il me semble que j'avais insinué une légère vacherie quant à l'origine de son succès, ce dernier coïncidant avec son mariage; l'élue était une demoiselle Lafon, demoiselle dont le père aurait été un auteur reconnu et primé en ce temps. J'avais pourtant lu la chose. En fait, le beau-père de Mauriac était banquier et le Lafon auteur et primé était gay, aussi peu assumé que Mauriac dont il était un ami proche (ne me demandez rien quant au niveau de proximité).

Autre vacherie. J'ai, dans un essai intitulé "Tous les états de la Mélancolie bourgeoise", taillé quelques costumes à L.B., cinéaste romand reconnu. Il s'était complaisamment étalé dans une sorte d'article hommage à un grand auteur romand fraîchement décédé dans lequel il alignait mensonge sur cliché. J'ai lu dimanche dernier une chronique de sa main et ai hurlé de rire. Cet homme a du talent et je sais l'apprécier. Qu'on se le dise et le répète lorsque mon essai sortira.

Pour le reste, ça attendra demain, je suis fatigué pour l'instant...

samedi, août 28, 2010

12. De la pudeur selon Mauriac


François Mauriac avait une pratique de la pudeur ... à la limite de l'hypocrisie. Il était gay, passionnément attaché à la perfection de la jeunesse, à la beauté masculine. Il passa sa propre jeunesse à papillonner autour de Cocteau et de Lucien Daudet. Toutefois, il ne se départit jamais de sa foi catholique ... Jean-Luc Barré, dans le premier volet de la biographie qu'il lui consacre, expose avec habileté la double influence qui régit l'intimité de l'auteur.


Je n'arrivais pas, jusqu'à il y a peu, à me faire une "religion" à propos de la discrétion mauriacienne. L'a-t-il fait ou pas ? Je pense que oui, une fois au moins oui, preuve à l'appui. Aurait-il dû assumer ? Oui, trois fois oui et qu'importe si une tripotée de vieilles filles racornies de partout en eussent fait une attaque. Nous avons tous le devoir d'assumer ce que nous sommes et encore plus particulièrement lorsque nous faisons partie de la grande famille des intellectuels. Julien Green ne renia rien de sa jeunesse et n'en perdit pas pour autant la foi. Le Seigneur nous aime tel qu'il nous fit : libres et très différents les uns des autres.


Après une récente conversation avec une connaissance, je compris la délicate position du Mauriac privé face au Mauriac public, l'auteur reconnu. Cette connaissance, que je n'avais pas revu depuis avant les vacances s'enquit de ce que j'avais fait ces derniers temps, mes voyages, etc. A brûle-pourpoint, il me lança "je viens de me taper une jeunette de vingt-deux ans sur la plage d'Epesses" et de rendre précisément compte de sa rencontre, avec tous les détails. Nous n'étions pas au chapitre des confidences égrillardes. Je subis poliment ce récit et repensai à Mauriac, le discret Mauriac qui tenait la jeunesse, la beauté, l'attirance sexuelle en trop haute estime pour les salir par des allusions grossières qui n'auraient eu, pour seul but, que de vaniteusement faire valoir son auteur. Pour preuve, le séducteur dut tout de même s'enquérir de l'âge de son gibier ...




vendredi, juillet 09, 2010

13. Emma, Julien, Adrienne et les autres

Vous ai-je déjà parlé des bruits de la nuit alors que, à Morges, dans un quartier périphérique de Morges, un quartier populaire, à la lisière de villages cossus, dans mon lit, la fenêtre grande ouverte sur les parfums et les sons de cette campagne alentour je lisais "Madame Bovary" et le "Rouge et le noir". C'était l'été, j'avais ... quatorze ou quinze ans et je lisais en me forçant un peu ces "grands" romans. Quelques beaux passages mais, particulièrement avec "Madame Bovary", une compréhension intuitive de l'ennui et de la pusillanimité de cette femme. Julien, à l'époque, me parlait bien plus ! Que de fois, alors que je tentais de séduire maladroitement un garçon, je pratiquai sur un mode Sorel. "quand l'heure pleine sonnera, je lui prendrai la main".

Jamais je ne fus un bon "chasseur". Soit l'on plaît, soit l'on ne plaît pas ... et pour ce genre de choses, les finasseries ne sont pas de mises, on sait très bien de quelle façon ça se finira. J'aurais quarante ans le 20 juillet et, de mon adolescence, je ne retiens pas quelques boulimies sensuelles ou d'inoubliables "foirées", je garde le souvenir exact d'Emma, de Julien, il me souvient un été avec la vaste saga de Dumas (de son nègre plutôt), de "Joseph Balsamo" au "Collier de la reine". Je me souviens aussi du premier roman que j'écrivis, un roman historique ! qui, de dépit, finit à la poubelle. J'avais écrit ce texte pour les 700 ans de la commune de Morges. Je livrai un manuscrit, le jury lui préféra et de loin de jolis travaux besogneux. On ne me remercia pas même de l'effort.

Ce soir, je suis à Berlin, Schöneberg, quartier gay. Il n'est pas tard pour Berlin mais j'ai préféré profiter du calme exceptionnel de mon logement, un "obergeschoss" au-dessus d'un bordel où des filles qui ne savent pas marcher avec des talons trop hauts ramènent le client racolé dans la rue. J'entends la rumeur de conversations lointaines, la circulation comme le flux d'une rivière, le vrombissement des bus, "Ersatzverkehr", les U-Bahn s'arrêtent tout de même trois-quatre heures durant la nuit. Je perçois aussi de jeunes gens turcs et la scansion saccadée de leur allemand, ils sortent peut-être du bordel. Je retrouve avant tout la nuit et ses miracles, une nuit pareille à celles que je connaissais à quatorze-quinze ans. Il y a un roman posé près de moi, un texte que je dévore dans les transports, à la plage, au parc, au lit, "Adrienne Mesurat" de Julien Green. Tout le poids de l'ennui et de l'enfermement se retrouve chez cette jeune fille, une vie à passer à côté de la vie ...

Je me persuadai longtemp d'être passé à côté de la vie, je ne vis sincèrement pas passer les vingt-cinq dernières années. Il y a bien ce corps plus aussi fringant que je le souhaiterais, son usure, ses paresses alors que je serais libre de faire la tournée de tous les pince-fesses gay du coin, et il y en a mais le charme discret de la littérature et cette nuit, à mille kilomètres et plus de vingt ans de celles que je connus à Morges, cette nuit me retient, lire encore quelques pages d' "Adrienne Mesurat".

dimanche, juin 06, 2010

14. Carrie et moi


Je n'ai jamais cessé de balancer entre Carrie Bradschaw et ... Thomas Bernhard ! Cela tient d'un grand écart magistral. Rajoutez à cela mon catholicisme, mes "difficultés" à vivre simplement une relation de couple, quelques fantômes dans le placard, la crise de la quarantaine et les facéties de Cy; je tiens là le strory-board le plus "branque" d'un improbable épisode de Sex and the City joué sous exta. J'avais prévu un autre petit billet charmant sous le chiffre 14, un mot à propos de ma Pentecôte, à Münich, Thomas Mann, ma chère Allemagne wilhelminienne et deux ou trois considérations moroses de fond mais je sors à peine du cinéma avec Cy (pour ceux qui tomberaient sur ce blog par hasard, Cy est un garçon, mon compagnon depuis bientôt trois ans et, oui, je suis gay).

Nous avons passé un formidable moment avec Carrie, Samantha, Charlotte et Miranda, Sex and the City 2, des histoires, une histoire belle comme la vie et je me suis souvenu pourquoi j'avais déjà traversé tant de crises avec Cy, pourquoi cela valait la peine, et je me suis aussi souvenu que, lorsque j'ai commencé ce blog, j'avais un voeu, très simple et très compliqué à la fois. Je voulais d'un mari ... un garçon qui m'aimerait. Cet après-midi, j'ai pu me dire ce que j'ai su dès le premier instant : c'est lui, c'est Cy et qu'importe si parfois il ne me comprend pas, je ne suis pas toujours facile à suivre. Je ne vais pas devenir un auteur sirupeux enrubanné de rose bonbon, je ne vais pas quitter mon "réalisme désabusé" mais je vais tâcher de me souvenir à chaque fois que je serai trop acerbe de cette après-midi au cinéma.

Encore deux mots de ce film, son intelligence, la qualité de sa photographie, des images belles comme une relation idéale, un mariage gay de conte de fée, une promenade sur la plage dans une atmosphère à la Shérazade, juste retrouver un peu du plaisir que j'avais à vous écrire depuis mon vieil appartement, la fenêtre ouverte à la belle saison, le bruissement de la nuit, ou depuis mon lit, de lourds flocons s'écrasant sous le faisceau orangé des réverbères de l'avenue de Morges en hiver ...


P.S. Le précédent billet n°14 deviendra le billet n°13 et sera posté fin juin, ce sera notre Pentecôte différée.

vendredi, avril 09, 2010

15. Impressions berlinoises


A Berlin, je ne suis pas en vacances, je mène ma vie ... berlinoise, faite de courses à travers la ville, de visites à des oeuvres; j'entretiens un commerce amical avec les oeuvres d'art de ma connaissance, je vais trouver les Carus et les Friedrich de l'Alte nationale Galerie, ou l' "Amour als Sieger" du Caravage à la Gemälde Galerie, les Otto Müller du Musée Die Brücke, les Nolde de la Neue nationale Galerie. Il y a aussi Ch., Li. et la mère de cette dernière. Il y a les bistrots, les salons de thé où j'ai mes habitudes en dépit des changements perpétuels. Je me suis surpris, l'autre soir, à cheminer sur un trottoir de luxe dans cette ville, un trottoir parfaitement terrassé, avec la bordure de petits pavés, les pavés plus larges pour le bas-côté où se garent les voitures, et les plaques de béton moulé pour le revêtement central, un carrelage parfaitement ajusté. Tout ce luxe, derrière les voies de trains et de S, à trois cents mètres de l'Ostbahnhof. Un lieu que j'ai connu autrefois dépourvu d'éclairages, au sol criblé d'ornières vaseuses et, partout, des ruines post-industrielles. Aujourd'hui, on y trouve LA BOITE de Berlin, le Berghain, un lieu qui a perdu son âme alors que les rues qui l'avoisinent se sont couvertes de réverbères high-tech et de mégastores du jardinage, du bricolage et de la mangeaille.

Je décolle dans quelques heures. Je rentre satisfait. J'ai passé ma dernière soirée avec Berlin - jusqu'à mon prochain séjour - au cinéma, l'Odeon sur la Hauptstrasse. Je suis allé voir "A single Man" de Tom Ford avec Colin Firth et Julianne Moore. J'ai failli manquer ce film si mal vendu en Suisse et en France. A aucun moment, je n'ai entendu dire que le principal protagoniste était gay, qu'il vivait le deuil de son ami. J'étais persuadé d'avoir affaire à une bluette académique. Je n'irai pas jusqu'à parler d'une conspiration du silence ... Toutefois, je constate que j'ai vu ce film à Berlin, tout comme j'ai vu "Lourdes" de Jessica Hausner avec Sylvie Testud. Silence radio dans les salles romandes. La religion poserait-elle autant de problème que l'homosexualité ? Sous des dehors de tolérance bonnasse, ne se cacherait-il pas une volonté de nivellement des particularismes et différences ? Cette tolérance n'est que le fruit blet d'une impéritie crasse.

Je pars dans quelques heures, j'emporte le souvenir de la visite au Neues Museum, le nouvel ancien musée égyptien que l'on a remis à peu près en état dans un goût et une mise-en-scène dignes des trottoirs d'un luxe inutile aux abord du Berghain ... L'endroit est si chic, qu'il faut acheter son billet à l'avance et pénétrer le saint des saints à une heure dite. Il y a deux ou trois beaux effets pour un ensemble assez peu intéressant. On en vient presque à regretter son précédent état et les bombes alliées. Qu'importe, Berlin se situe à un autre niveau. Son snobisme muséal lui passera aussi vite que la nouveauté de la chose.





dimanche, mars 28, 2010

16. Endlich zu Hause


Le dimanche des Rameaux n'est pas très festif à Berlin. On annonce les souffrances du Christ, on s'appesantit sur sa mort prochaine, sur le déchirement des derniers instants et on oublie son entrée triomphale dans Jérusalem et La Promesse dont il est porteur ! Je me souviens d'un dimanche des Rameaux à Barcelone lumineux, d'une procession et de la messe donnée à une foule enthousiaste sur le parvis de San Augustin. Les catholiques berlinois se roulent dans un victimisme hors de propos, incompréhensible ... En fait, ils pratiquent la foi hors les églises, quelles qu'elles soient. "Ni Dieu, ni Maître" pourrait être peint en lettres capitales sur tous les panneaux annonçant l'arrivée à Berlin.

samedi, février 27, 2010

17. Temps de carême


Dans l'attente du printemps - quoique je ne sois pas un fétichiste de la belle saison et de ses débordements obligatoires - il nous est donné un temps de carême, un moment de repli, ou plutôt de retour à soi avant le miracle pascal. Je vis ce temps dans la compagnie de Mauriac et de son "Adolescent d'autrefois", une envie subite après ma longue parenthèse littéraire germanique, près d'une année en compagnie de Thomas Bernhard. Je retrouve la morale scrupuleuse de Mauriac le catholique, dont la personnalité est tout enroulée autour d'un secret "inavouable". Je retrouve un Paris qui n'existe plus et une région bordelaise toujours aussi bien élevée, fière et discrète. En compagnie de Mauriac, j'attends Pâques et Berlin, j'y passerai le dimanche des Rameaux, et le Vendredi Saint. La veillée pascale aura lieu en Suisse, je ne manque jamais le dîner de Noël et de Pâques chez ma mère en compagnie de ma soeur, mon neveu, ma nièce et, peut-être, Si. si son horaire le lui permet.

L'édition d'un "Adolescent d'autrefois" que je me suis procurée - une édition de poche - est augmentée d'un appareil critique, ça sent la lecture studieuse et le programme de bac. Toutefois, le propos y est intelligent. J'ai même parcouru un bio-bibliographie express dans laquelle j'ai appris l'existence des "blocs-notes" de Mauriac. Je savais qu'il avait publié des textes personnels, de la réflexion sur l'actualité et l'époque mais cet intitulé de "Bloc-notes" m'a frappé, cinq volumes, du blog avant l'heure ! Mauriac tiendrait-il un blog s'il était vivant aujourd'hui ? Ce n'est pas improbable. Jean-Louis Kuffer tient lui-même un blog sagace et érudit. Je m'interroge sur les moyens de diffusion de la "chose" littéraire. Madame de Sévigné fut sacrée autrice du fait de sa correspondance. Du vieux ragot mondain, un travail surfait selon mon avis; on y apprend ... rien et tout à propos de M. de Truc, Mme de Bidule, la princesse de Chose ... Un pensum ! On aurait mieux fait de laisser son caractère privé à cette ennuyeuse correspondance. Le trois-quarts des blogs ne sont pas plus intéressants et nettement moins bien écrit !

Question diffusion de mon travail, j'ai donné une interview sur Espace 2, "Entre les lignes", une série d'émissions consacrée à un numéro du journal littéraire "Le Persil", un numéro portant sur le "Tiers participant" ou comment les autres interviennent dans le texte. Évidemment, mes "collègues" auteurs ont rendu des hommages en long, en large et en travers à Pierre, Jacques ou Jean; quant à moi, j'ai expliqué à quel point l'autre, en général, "me les brise". Pour les besoins de l'émission, un acteur a lu mon texte et j'ai répondu à quelques questions par la suite. Au cas où cela vous dirait, vous pouvez écouter mon intervention et la lecture du texte sous le lien donné au début de ce message, en date du 8 février, cliquez le petit logo juste à côté de la date et vous me trouverez entre la minute 15 et la minute 30.

samedi, janvier 09, 2010

18. Coco Chanel et Igor Stravinsky


La liaison est présumée, elle reste dans le cadre du vraisemblable, Coco Chanel et Igor Stravinsky, un film, la peinture d'une époque, le premier quart du XXème, des images d'un graphisme parfait, d'une élégance léchée et la musique, le ballet, le service impérieux de l'art, une Anna Mouglalis dans la peau de Coco encore plus Chanel que Gabriel ... Stravinsky n'a pas eu peur d'affronter la nouveauté radicale à laquelle son talent l'a ouvert, pareil pour Chanel; le réalisateur Jan Kounen s'inspirant d'un roman de Chris Greenhalgh a merveilleusement rendu cette époque contradictoire, séduisante et inique, le glissement d'un monde de traditions vers ... autre chose. L'oeuvre est esthétiquement aboutie, froide comme la réussite et attirante comme un garçon inaccessible. J'ai, le temps d'une séance, retrouvé ce cinéma d'atmosphère qui n'a guère plus court aujourd'hui.


Sitôt sorti de la salle, j'ai tout de suite voulu écrire un billet. Accessoirement, cela fait plus de cinq jours que je repousse le moment de vous parler. La semaine dernière, Avatar avait suscité mon enthousiasme, voire même mon ravissement; j'avais pensé en dire quelque chose et, finalement, la nécessité m'en a passé. Je n'ai pas envie de surfer sur la vague d'un engouement général quand bien même il est légitime. Je ne suis pas fait pour ça. Mon travail d'auteur m'entraîne ailleurs ... ailleurs que sur un blog ! Je suis donc venu vous dire que je vais m'en aller, que "Le Monde de Frevall" ne va pas durer pour la simple raison que je n'en vois plus l'intérêt. Je suis quelque peu mieux établi dans ma "carrière" d'auteur. Soit, je suis peu publié, encore moins lu mais, dans les deux cas, je le suis, tout de même.


J'ai adoré vous écrire, vous parler de ce que j'aime, vous faire partager mes préoccupations et mes "coups de coeur". Avec vous, j'ai fait face aux critiques, à la tentative de censure ... A présent, mon blog est un pauvre îlot perdu dans la toile, il représente toujours un investissement de ma part (temps, effort) mais sa forme n'est de loin pas à la hauteur de son contenu. Vanité ?! oui, peut-être mais mon travail d'auteur mérite un certain cadre et du respect. Je ne suis pas programmateur, je ne vais pas transformer mon blog en un sapin de Noël internautique, avec plein de gadgets qui lui assureraient un minimum de visibilité.


Nous n'allons pas nous quitter comme ça ... Je vais encore tenir ce blog jusqu'au 31 décembre 2010. J'ai décidé de vous offrir dix-huit articles pour cette année, encore dix-sept, le dernier au 1er décembre 2010. Et, pour 2011, vous retrouverez peut-être ma plume sur la toile, ou non ... A moins que vous ne retrouviez mes billets internautiques dans un florilège publié ?! Je ne sais pas, pas encore. Encore tous mes voeux pour cette nouvelle année.

dimanche, décembre 27, 2009

Du bonheur de la blanchisserie


Tout va très bien chez Mme de W. qui vécut à V., une bonne ville de la Riviera vaudoise. Tout va si bien que c'est à se demander pourquoi tout le monde court dans tous les sens à Lausanne et dans le reste du canton ?Pourquoi ne suivent-ils pas l'exemple de V. où l'on vaque à la prospérité de son ménage et où l'on n'a pas perdu le sens commun et des usages ! A Lausanne, sur la Côte et dans le reste du pays, on aime tellement s'inventer des histoires; ça passe le temps, ça vous remplit une vie mine de rien et ça vous évite de cerner le coeur du problème ... Un problème qui n'est pas le mien, chacun se débrouille avec ses valises de linge sale. Personnellement, j'ai opté pour une machine à laver personnelle, un "outil" domestique qui me vaut d'être encore dans l'enseignement ! Je m'explique. A l'époque quand j'achetai la chose - d'occasion et pour la somme alors colossale de 400,- - je venais d'emménager dans le quartier de Prélaz, mon vieil appartement, le deux-pièces-cuisine qui ressemble à un garni des années Quarante. J'étais en pleine (dé)formation pédagogique dans une institution qui sévit aujourd'hui encore. On m'y disait bien des choses, et des pires, à tel point que je faillis raccrocher ! J'avais un stage pédagogique rémunéré doublé d'un remplacement dans un gymnase (un lycée pour mes lecteurs non-suisses) et une machine à laver et un déménagement à payer. Je ne fis donc pas la fine bouche et persévérai dans la voie dans laquelle j'étais engagé. Ma carrière enseignante doit ses débuts au hasard et son affermissement par la jouissance d'une machine à laver à demeure ! A noter que cette carrière aujourd'hui se poursuit parce que l'enseignement me réussit autant qu'à mes élèves !

Récemment, voyant de l'eau près de la fameuse machine, d'un âge aujourd'hui canonique, je me réjouis à l'idée d'une fuite ! L'exacte excuse que j'attends impatiemment afin de courir acheter une nouvelle machine à laver qui massacrera moins mes chemises ! Fausse alerte, ce n'était que Cy. qui, une fois de plus, avait répandu de l'eau un peu partout lors de sa douche ... Je vais donc garder ma championne toute catégorie du froissage intégral. Il ne s'agit que d'un menu désagrément, l'affaire de deux minutes de plus par chemise au repassage, cela reste sans commune mesure avec le calvaire de ceux qui se traînent des ballots de linge cradingue, soit qu'ils ne peuvent pas le laver ou qu'ils ne savent pas comment le laver... La métaphore est à méditer jusqu'au 31 minuit, histoire de prendre de vraies bonnes résolutions. Quant à moi, je repasse en regardant la télévision, je prends donc pour 2010 la résolution de ne regarder que des séries qui me plaisent , et l'économie d'une nouvelle machine financera l'achat de DVD ! Voyez, depuis que j'officie chez Mme de W. qui vécut à V., bonne ville de la Riviera vaudoise, tout va plutôt bien !

lundi, décembre 07, 2009

"Mère et fille" et autres considérations


Il y a Catherine, l'immense Catherine, Mlle Deneuve, la femme mystérieuse, lointaine, distante, froide et intrigante ... Ses mimiques, sa présence et, étonnement, mon enfance, mon adolescence profondément francophile. Nous sommes allés voir "Mère et fille", le dernier film de Deneuve dimanche après-midi, joli récit au rythme lent, des effets si propres au cinéma français, exposition de vies mélancoliques et bourgeoises, problématiques si délicieusement décalées. A croire que la France n'est faite que de médecins, de commerçants bien installés, de résidences d'une douzaine de pièces minimum, une sorte de projection idéale et chabrolienne d'une société qui n'existe guère plus que mon enfance ou mon adolescence. L'histoire s'étage sur trois générations de femmes, la grand-mère est évoquée par la petite-fille; Mari-José Croze est parfaite dans le rôle de la revenante fifties', la coiffure, le décor, tout est d'un soin parfait ... et passéiste.


Je pense avoir perdu ma francophilie avec un certain goût pour la mélancolie, un goût doucereux, un penchant pour les atermoiements rebrodés, les non-intrigues charmantes. J'en ai fini avec ma période française, difficile toutefois d'en quitter les facilités réconfortantes, de la bimbeloterie mélancolique, des effets éventés ... "Mère et fille" n'est ni pire ni mieux que "Les Herbes folles", un si joli savoir-faire et si peu à raconter, des histoires surannées pour rester poli. Et comment vais-je faire sans ce délicieux petit genre éculé, une forme de "vraie vie" pour vieille fille que j'affectionnais tant !

jeudi, novembre 26, 2009

A défaut de Berlin




A défaut de Berlin, j'ai passé une après-midi à Berne, un samedi ensoleillé dans la capitale, une promenade en surplomb de l'Aar, les coupoles du palais fédéral desquelles des corneilles se jettent dans le vide et planent en larges cercles. Je pense aux corbeau de Wotan. Je pousse jusqu'à l'esplanade de la cathédrale. Berne, sa vieille ville, une cité tout droite sortie d'un livre de légendes, des légendes auxquelles il faut se livrer, comme les corneilles au vide, pas si vide, la masse de l'air et nous planons sur des siècles d'histoire. Il suffit de la connaître pour ne pas tomber.


Ma promenade avait un but, la rétrospective Giovanni Giacometti, le père d'Alberto, un peintre qui a fait partie de la mouvance Die Brücke. Cet homme au talent reconnu, formé dans la Munich de la Sécession, est rentré dans son village natal, on a acheté son séjour contre une forte somme ! Stampa, les Grisons, un bon mariag et où est passée la liberté berlinoise des autres membres de Dies Brücke ?! Giacometti a soigné son image d'artiste officiel et n'a pas sacrifié son talent. A part quelques toiles convenues ... Quel secret a nourri ce talent ? L'évidence de nudités pures sous un soleil de légende crève la toile.

dimanche, novembre 15, 2009

1989-2012



J'y étais ! Non, je n'étais pas à Berlin le 9 novembre 1989 comme tous les "winners" de la planète, il me souvient à peine ce que je faisais à 19 ans, le mur, Berlin, le bloc de l'est, etc., ne me parlaient absolument pas alors. J'étais à la projection de 2012, vendredi passé, la séance de 13h15. En soirée, le film fait salle comble, c'est un événement, le film de Blaireau avec un B majuscule. Je suis très bon public pour ce chose, j'adore le cinéma populaire, la cuisine sans chichi et tout ce qui permet d'aller droit au but. Je réserve - d'une manière très germanique - ma finesse de sens et d'esprit aux Beaux Arts, à la musique de Wagner, à la porcelaine de qualité et aux fleurs, et ma foi à l'Eglise catholique romaine apostolique et universelle. "Le reste n'est que garniture", chantilly foireuse, crème grassouillette dans lesquelles je plonge parfois avec délice quand l'envie m'en prend. 2012 en fait partie. Et quel spectacle, mes amis, de la catastrophe eschatologique et moralisante à deux balles, la tabula rasa en dolby stereo et tout et tout. Le fameux calendrier Maya, un vieux buzz de la toile qui adore claironner complot et fins du monde à chaque tournant de page ... Ca plaît aux blaireaux.
Ah, ça ne vaut pas ma chère Berlin où l'on assume pleinement d'aimer le pire et le meilleur tout ensemble, où l'on écrit avec tant d'aisance, où l'on vit, avec simplicité, pareil chez Mme de W. Dans la bonne ville vaudoise de V., on aime aussi les arts avec mesure, la nouveauté sans excès. Accessoirement, j'y étais ce samedi, la "journée porte ouverte" de l'établissement dans lequel j'enseigne. Emotion, je présentais la nouvelle mouture du journal de l'école, nouveau graphisme, tirage augmenté, nouvel imprimeur : un franc succès, aussi mouvementé et plein d'effets que 2012. Je le répète, un succès ! Le journal est accrocheur comme un "blockbuster", nettement moins moralisateur et bien plus subtile que le genre. Même si l'on m'avait fait des reproches au sujet de "mon petit journal", je persisterais et signerais deux fois sous le titre de rédacteur en chef.