dimanche, décembre 31, 2023


Bonne année 2024 à toutes, tous et aux autres, quel que soit le genre dans lequel vous vous reconnaissiez. Pour bien commencer l'année, voici une proposition de lecture afin d'aller au-delà de la souffrance propre au délire général de mars 2020 à mai 2022, voire début 2023.

"C'est fini, il faut passer à autre chose et blablabla" dit-on au café du commerce, disent nos autorités et les mer ... pardon, les médias. Mais la colère contre les collabos aux p'tits pieds, les seconds couteaux émoussés  au service des "génies" du great reset - terme qui me renvoie à l'expression bébête de dadames ébahies devant un bébé lui enjoignant de "faire risette" - cette colère ne s'est pas magiquement envolées avec la fin des mesures et il faudra bien en faire quelque chose ! Et que dire du deuil, deuil des amis, de connaissances plus ou moins proches, de figures publiques, parties "en live », que dire encore du deuil de la confiance en nos autorités politiques, morales, médiatiques, médicales et religieuses: toutes sont tombées très bas.


Le temps et les non-dits n'arrangeront rien à la situation, un retour sur les « événements » est nécessaire. A défaut d'un grand procès au cours duquel je me ferai un plaisir de personnellement traîner par la peau du cul un nombre certains de nuisibles pour leurs propos, mensonges, violences psychologiques, institutionnelles et, même, physiques, il y a un travail personnel à mener et l'ouvrage ci-dessus en est un outil.

 Allez, bonne année à tous, même à ceux à qui un petit examen de conscience s’avère de première nécessité.

 

lundi, novembre 21, 2022

 


Il faudrait que je donne des nouvelles, dire que tout va bien, finalement, outre la colère, le dégoût, le mépris … Je ne citerai pas de noms, à peine quelques circonstances : le collaborationnisme des bistrotiers, des espaces culturels, des autorités de la bonne ville que nous avons quittée. La résistance d’une poignée aussi. Vous me direz que notre nouveau séjour rural a certainement été touché par les mêmes maux, la même petitesse, le même délire nasitaire. Soit. Nous n’y étions pas. Ce village est une page blanche, une sorte d’armistice. En attendant. Godot ? la vérité ? le grand soir ? la résurrection des boutons de guêtres comme le disait grand-maman ? En attendant que les salauds, demi-salauds, demi-sel et autres seconds couteaux soient traînés devant les tribunaux. En attendant un timide « nous nous excusons », « nous avons eu tort » et, peut-être, reprendre là où on en était resté. En attendant, les promenades le regard courant sur les crêtes du Jura, le silence de la nuit, les étoiles, l’odeur de l’air, autant de remèdes dans ce qui ressemble à une convalescence. Même les tableaux ont l’air plus heureux aux murs de la ferme Bally ; nous louons des comble chez le paysan poète. Selon le trajet de la balade avec les chiens, je passe trouver le défunt homme au cimetière, j’ai trouvé sa tombe, qu’il partage avec sa soeur et son épouse.

dimanche, mai 29, 2022

Credo : le retour !

 


La nouvelle est tombée, mine de rien, mardi matin, un message sur msn, un vocal, pas possible de l’écouter, j’étais en réunion. Puis j’ai oublié. Jusqu’à mon retour à la maison, ma table de travail dans la bibliothèque, un petit chien sur le canapé, l’autre sur le balcon, mille trucs à faire, normal, vie décousue … ou plutôt vie aux rythmes décousus depuis … depuis vous savez quoi, ce que l’on nomme pudiquement « la crise ». Entre la promenade des chiens et se préparer à déjeuner, j’écoute le vocal, il est suivi d’un nom et d’un n° de téléphone, recevoir mes exemplaires. J’ai de la peine à croire le message que j’entends. Je sais que les deux dernières années ont été très compliquées, pour les éditeurs aussi.

 Andonia en personne m’annonce donc que « mon livre est arrivé », qu’elle le trouve très beau et qu’elle espère que je serai content du résultat ! Le dossier de presse est en cours, le distributeur va prendre le relai, mais pas d’inquiétude, ceux qui veulent commander le texte directement auprès de l’Age d’Homme peuvent le faire dès maintenant. C’est une joie subite et violente qui déferle en moi, un barrage a cédé, je pense immédiatement à ma mère, décédée en août dernier qui ne le verra pas et qui l’attendait.

 J’en avais parlé dans ce blog en juillet 2019, préparant déjà le terrain pour la sortie en novembre 2019. Quelques retards dans la mise-en-forme, recherche d’une couverture et tout le tralala, l’affaire de 4 mois mais mars 2020 puis tout le reste. « Tout le reste ». Je le lis à voix haute alors que je le tape à nouveau. J’aimerais en dire tant plus et, à la fois, je crois qu’il n’est pas possible d’être plus concret. Je travaille sur ce « tout le reste » que nous sommes nombreux à ne pas vouloir juste planquer comme une chaussette sale sous le canapé. J’y travaille en ce moment à très petites touches parce qu’on ne tient pas un cactus à pleine main. Durant deux ans, j’ai été très occupé, façon « territoire occupé ». Je m’étais fait à l’idée : Credo serait un texte pris dans les limbes de notre temps.

 A présent, tout peut arriver, je m’en fous : je suis publié à l’Age d’Homme ! Je suis un auteur publié à l’Age d’Homme avec un ouvrage dont la couverture est de la main même de l’héritière Dimitrijevic, mon nom sera inscrit dans le catalogue de l’Age d’Homme parmi celui de grands auteurs. Je viens de rentrer par le mérite de mon talent dans un club et tant pis si je n’y occupe qu’un tabouret. Je sais que mes autres éditeurs ne le prendront pas mal, je pense tout particulièrement à Stéphane Bovon et à Olivier Morattel. Je ne hiérarchise pas les maisons d’édition mais l’Age d’Homme, son histoire !  … et mes rêves adolescents. J’avais envoyé l’un de mes tout premiers manuscrits à l’Age d’Homme. J’avais 16 ans.

 Credo devait être, à l’époque, mon dernier opus autofictif. C’est râpé. Il y a Construction dont je vous reparlerai et …et bien dansez maintenant sur lequel je travaille en ce moment. Le pitch de Credo était simple, j’explique mes convictions d’alors, cette époque d’avant, quand j’étais élu politique, membre du conseil de paroisse et pesco-végétarien. Je ne vais pas vous refaire un Credo bis, autant vous le dire de suite : je ne me suis pas représenté au Conseil Communal, j’ai démissionné de l’UDC, j’ai quitté le Conseil de paroisse et j’ai recommencé à manger de la viande. Pourquoi ? Dans l’ordre d’énumération, 1. les décisions politiques conformistes prises durant « la crise » ont profondément heurté mes convictions civiques, 2. la direction de l’UDC a soit compris les risques que « la crise » ont fait peser sur notre Constitution mais les petits élus locaux n’ont pour la grande majorité pensé qu’à leur cul, leur réélection et les dernières alliances électorales ont ruiné le peu de confiance que j’avais encore dans ce parti, 3. notre très Sainte Mère l’Eglise est aussi mal dirigée urbi et orbi que la politique suisse traditionnelle, 4. mon organisme grandi et nourri à la protéine animale durant près de cinquante ans a eu du mal à soutenir un régime qui ne lui était pas naturel, surtout parmi la colère et le désarroi d’alors.

 Mais il n’y a pas que ça dans Credo, il y a la petite musique de notre très chère fin de XXème siècle, un petit coup de nostalgie pour faire bonne mesure, un trait de vitriol contre notre grand voisin à l’Ouest, le renouvellement de mon attachement indéfectible pour la double couronne austro-hongroise, de la vacherie chantournée, de la peinture, du cinéma, Berlin et Barcelone, un zeste de middle-life-crisis. C’est chou tout ça, le fameux « tout ça » d’avant « tout le reste ». J’adorerai traverser à nouveau les problèmes que j’avais alors. Credo ou la chronique de comme nous étions beaux et heureux en ces temps révolus.  

lundi, mars 07, 2022

Espoir politique, campagne 2022 et retour sur la "crise"

Le masque à plus de 20 cm de distance ne sert à rien, le confinement n’a sauvé personne, bien au contraire ; le pass nasitaire … sanitaire est anticonstitutionnel ; la balance bénéfices-risques du vaccin anti-covid (toujours en phase d’essai) penche de plus en plus du mauvais côté mais tout cela n’est pas le sujet de ce billet. C’est un sujet de réflexion sur lequel tout citoyen devrait cogiter, encore et encore.

Il y a peu, j’ai démissionné de l’UDC. Je garde encore toute mon affection et mon estime à cette famille politique et je comprends aussi que la pratique de la politique nécessite parfois de passer outre l’une ou l’autre de nos convictions personnelles. Toutefois, j’ai estimé que je ne pouvais plus transiger avec le respect de notre Constitution et des droits fondamentaux encore garantis jusqu’à il y a peu à chaque citoyen suisse. L’UDC a milité pour le non au durcissement à la loi Covid, sujet passé en votation le 28 novembre 2021. J’ai eu l’occasion de constater la tiédeur de certains élus UDC dans cette campagne cruciale et à des fins électoralistes (éviter d’être associés à des « agités », prochaine campagne électorale cantonale 2022, simple désintérêt pour le sujet …) Soit.

Je ne peux toutefois plus adhérer à l’UDC Vaud depuis son alliance électorale avec le PLR. Comment peut-on faire alliance avec un parti qui a chanté les louanges de la vaccination quasi forcée et de la coercition sous prétexte d’une épidémie qui n’a de loin pas causé l’hécatombe imaginée (prévue ? voulue ? souhaitée ?) Je suis de tout cœur avec celles et ceux qui ont perdu un proche, un ami, un parent du fait de cette maladie ou de toute virose de saison, ou d’une infection nosocomiale, d’une maladie dégénérative, auto-immune, orpheline. J’ai perdu ma mère en août dernier. Elle avait 82 ans. Cancer. La mort de tout être est un scandale, toujours, mais il est un âge à partir duquel le scandale est moins criant.

J’aurais aimé céder à la colère dans ce billet, « renvoyer son paquet », selon l’expression de Mauriac, au collabo’ lambda, au chiard qui craint pour sa pauvre petite peau – sans intérêt serai-je tenté d’ajouter – au capo’ à la petite semaine, tous ces moins que riens, ces tyrans aux petits pieds dont le pouvoir et les convictions ont été rendues caduques dans la nuit du 16 au 17 février, fin de toutes les mesures, ou presque ; la moitié des utilisateurs des transports publics, y compris les contrôleurs CFF, ne le portent que vaguement sur le menton. Les masques ont disparu aussi vite que les portraits de Pétain fin 44. Ici aussi, je peux comprendre le confort du conformisme, le manque de curiosité, de culture et la découverte choquante que l’on est mortel. Je me rappelle que ça avait été un coup dur pour moi. J’avais alors 9 ans. Plutôt que de céder à la colère, je préfère dire merci. J’ai eu de la chance. La chance de constater que tous mes amis et parents ont été fermement opposés à toutes les mesures aberrantes prises de mars 2020 à février 2022. J’ai pu compter sur leur soutien et j’ai encore eu la chance de rencontrer de nouvelles personnes, des amis à présents, d’en retrouver d’anciens et de relever que nous avions tous été nourris de beaux principes, de raison et d’humanité.


Nous ne sommes plus seuls ! Les citoyens soucieux de préserver la démocratie suisse ne sont plus seuls. Nous pouvons compter sur des associations professionnelles, des ONG, des réseaux et de nouveaux partis. Je pense au « Virus des libertés », « Ré-info Covid », « Choix vaccinal », « Collectif romand des éducateurs et enseignants » et, bien sûr, « Les amis de la Constitution » ! Tout n’est pas gagné. Les mesures ne sont que « suspendues » et la confiance dans nos autorités politiques est sérieusement entamée. Nous ne devons donc pas manquer de jouer la carte  électorale. HelvEthica, tout nouveau parti issu de la phalange politique des « Amis de la Constition » s’offre un galop d’essai dans cette campagne vaudoise 2022. Il n’y va pas seul mais avec « Droits et Liberté » et « Evolution Suisse » sous la bannière « Alliance des Libertés ». Ils sont trois à faire campagne pour le Conseil d’Etat : Lynn Dardenne (Droits et liberté), Olivier Pahud (Evolution Suisse) et Patrick de Sepibus (HelvEthica). J’ai eu l’occasion d’échanger avec chacun et chacune. Ils ont un programme : revenir aux fondamentaux, la Constitution, la voix du peuple et deux ou trois propositions pragmatiques, en matière de logement par exemple. Et surtout la volonté de laisser au citoyen la liberté de mener la vie qu’il a envie de mener.

Ils sont donc trois, ça laisse de la place pour y rajouter d’autres candidats en qui vous avez confiance … encore. Personnellement, même si j’ai quitté le parti, je vais tout de même aussi donner ma voix à Michaël Buffat. Je le connais, depuis plusieurs années, j’ai même soutenu sa candidature lors de l’assemblée des délégués vaudois de l’UDC. Et je sais qu’il pourrait travailler au bien du canton de Vaud en bonne intelligence avec les candidats de l’Alliance des Libertés.  

dimanche, janvier 30, 2022

Spencer, de Pablo Larrain

Un biopic de plus ? de trop ? sur feu la très/trop médiatique princesse de Galles. Rien de très engageant, quoique l'affiche, cette silhouette affaissée et gracieuse à la fois, presque une position d'oraison, introspection méditative ou, plus prosaïquement, la génuflexion  d'une boulimique-anorexique devant la cuvette des chiottes. Question mythe, ça défrise le fidèle quoique l’image reste belle. Et ce sous-titre : une fable tirée d’une tragédie.

Pablo Larraín, le réalisateur, m’était inconnu, de nom du moins ; il avait déjà signé l’excellent Jackie, un autre biopic consacré à Jacqueline Kennedy née Bouvier, ex-première dame et veuve de. Le film était agréable, adroit. Sans plus. Il señor Larraín a surtout donné dans des récits sud-américano-chiliens qui, je vous l’avoue, me touchent assez peu, voire pas du tout. Avec Spencer, il entre parmi les grands, entre une photographie impeccable – un petit rien de The others – et une BO jazzy-néo-classique signée Jonny Greenwood.

Le récit commence une veille de Noël. Diana en cabriolet Porsche décapoté fonce à travers une sublime campagne britannique. La princesse de Galles est perdue. Scène surréaliste lorsqu’elle débarque au « Dutch Café » pour demander sa route. Elle doit rejoindre le reste de la famille royale à Sandringham, la résidence royale dans laquelle la reine et toute la firme se doivent de passer Noël. L’épisode se déroule en 1991.

Sandringham House a tout du palais de conte britannique : fascinant, mystérieux, un peu inquiétant, fastueux et hors du temps. Comme dans les contes, ce palais est un piège. La fantasque Diana en proie à une profonde dépression essaie tant bien que mal de faire face pour ses enfants. Elle n’a qu’une seule amie dans la place, une habilleuse qui entretient un amour secret pour sa maîtresse. Une saloperie de petit caporal très service-service à la solde de la reine lui colle le train et tente de la cadrer, pour son bien !

Diana détestait Sandringham. Elle était pourtant née et avait passé son enfance tout près de là, à Park House, maison en ruine en ce Noël 1991. Durant son séjour, elle trouve du reste l’énergie et la volonté de s’évader, retourner dans ce chez-elle abandonné, menaçant ruine, comme une métaphore de sa vie de génitrice de descendance royale au service de la firme. Et le roquet service-service sur ses talons, la gueule pleine de discours sur l’honneur etc. dont la très libre Diana n’a que faire. Quand on n’écoute que l’amour et qu’on ne connaît que la liberté …

La fable que Larraín nous a brodée est d’une esthétique vraiment impeccable, ce qui vient même renforcer la sensation d’oppression, et la musique ! le très élégant, ingénieux et jazzy Greenwood nous interdit de décoller du drame. La vie pourrait être si belle, pourtant, sans l’étiquette, les mensonges, le devoir d’obéissance aveugle à une autorité qui, finalement, méprise tout ce qui n’est pas de son sang, qui marche avec majesté – croit-elle – sur la gueule de ses larbins.

Spencer est peut-être un biopic mais aussi une métaphore de notre situation de petites marionnettes citoyennes à qui l’on demande d’obéir et de se soumettre à des exercices humiliants pour le bien de tous !? Soit, Diana n’était pas une sainte. Le marketing a très bien su rattraper l’image de la vieille, de son aîné, de la maîtresse de toujours de ce dernier. Les cabinets de conseil faits pour ça ont très bien su replâtrer la légende de la firme royale, jusqu’à quand ? Et Larraìn fait de chaque spectateur une princesse malheureuse mais irréductible à la fin. Délivrés, libérés, nous pouvons quitter la salle persuadés que nous serons les seuls capables de rompre nos chaînes.


mardi, juillet 27, 2021

"La lumière des Césars", en librairie dès à présent.

 


Pour changer, je ne vous ai pas « offert » un opus autofictif. Pour une fois, je suis allé chercher plus loin, au pays des songes et de la vérité fabuleuse, cette autre réalité qui brille obscurément dans l’angle mort. Peut-être ne me suis-je jamais tant livré ; connaissez-vous le code ? Prenez et lisez, vous jugerez sur pièce.

Le récit est duel, ici et ailleurs mais où se trouve l’« ailleurs » ? Une galaxie ? une dimension ? un songe ? l’orientation d’une narration ? Il y a Steeve et Steve, genre le revers et l’avers d’une même pièce ; il y a aussi Alpha et Oméga. Deux états différents, allez savoir lequel est le bon ? Alpha, c’est ici-bas. Oméga n’est pas mieux mais dans un autre genre. Steeve y accède en prenant les commandes de Steve, quasi de la possession vaudou. En Oméga, la vie est tellement plus « Mitteleuropa », un univers hybride entre un opus de la série des Sissi et un épisode d’Hercule Poirot avec David Suchet dans la peau du détective belge. Ce n’est pas Art Déco mais Wiener Werk ou Secession. Voilà pour le décor.

L’intrigue ? Y a-t-il une intrigue ? Où court donc Steeve ? après la proie ou l’ombre ? Sait-il seulement ce qui lui arrive ? Il est ballotté d’une conspiration à l’autre, d’un système de valeur à la résolution d’un problème fantastique. Il est le héros qui ne connaît même pas les tenants et les aboutissants de la tragédie à laquelle il est sensé participer. Il n’est sûr que d’une chose : il est né en Alpha, son corps est coincé en Alpha mais il appartient à Oméga. Serait-il le jouet d’une instance malveillante ou l’instrument d’une sorte de … remise à zéro ?

« La lumière des Césars » est un texte que je porte depuis de longues années. Le hasard et des contretemps indépendants de la volonté de mon éditeur ont voulu qu’il sorte maintenant, en pleine non-guerre entre la liberté, la démocratie, toute notre bonne vie en style fin XXème et des puissants qui n’existent pas même s’ils existent mais ce  n’est pas du tout ce que l’on croit. Ma dernière publication est tout de même mieux ficelée. Les faits y sont tout aussi nébuleux mais il y a de l’action, une enquête policière, une révélation, un coup de théâtre, un retournement et un bref épilogue métaphorique, pour vous préparer à la suite.

Je porte donc ce récit depuis si longtemps que je n’arrive pas encore à me faire à l’idée qu’il existe, en un peu moins de 300 pages, avec sa couverture néo Art Déco, la deuxième et la troisième de couverture et leurs abattants illustrés, de la main de l’éditeur, deux scènes de rue en miroir, Alpha-Oméga. J’ai relu les épreuves, à plusieurs reprises, chasser la coquille, le contre-sens, l’approximation. Je n’arrive pas à lire le livre, les mots se dérobent, il ne m’appartient déjà plus.

Je souhaite que Steeve vous emmène aussi loin qu’il m’a déjà emmené, vers ces ailleurs en merveilles assourdies, un magasin de décours ou la coulisse de l’inconscient collectif ? A moins qu’Oméga n’existe vraiment, j’en aurai rendu compte par hasard, par inspiration ou par divination ?


« La lumière des Césars », éd. Hélice Hélas, 290 p., 24.-

lundi, juin 21, 2021

Anonymous - Chapitre 3

Dans le sommeil, on n’a pas besoin d’être cohérent, d’être « discursif », on peut être soi et un autre … soi. Saloperie de soma. Et rien que le nom me dit quelque chose. Mon frère s’est endormi, à côté de moi, le poids de son corps, la présence magnétique de sa personne, je la ressens intuitivement, et au-delà du sommeil, là où je redeviens un type de quarante ans, avec toute sorte de désirs que je ne comprends pas clairement. Je suis dans des maisons, des villages d’alpage, dans des téléphériques aux cabines larges comme une chambre, dans des stations de métro, auprès de personnes, de garçons, leurs visages si proches. Et le type de quarante ans que je suis n’est pas emprunté. Je ne suis pas emprunté. Je suis heureux, qui ne le serait pas, après avoir retrouvé ses seize ans, et quelle adolescence ! « Attendez, je vous montre, et j’arrive à faire ça – et une pirouette, souple élégante. En vérité, je vous le dis, avec l’âge, nous ne perdons pas nos possibilités physiques, nous perdons le mode d’emploi, comme la communication avec nos pieds, nos jambes, nos bras ! On se laisse déposséder de soi. « Il y a un brun qui sourit, un grand type de vingt ans, j’ai fait mon numéro, ça marche, une main amicale sur son épaule. C’est vraiment cool, belle soirée. Je refuse un verre, un minimum de sérieux, tout de même. Finalement, le brun me rattrape, me propose une bière, j’accepte. Il me parle de rêves, de l’impression qu’ils laissent au réveil. Je n’ai pas de position « théologique » sur le sujet, je m’aperçois, pour moi, que quelque chose m’échappe. Il y a le gamin de seize ans que j’étais la nuit passée mais j’ai l’impression qu’il y en a un autre, une homme un peu plus vieux, quelqu’un de proche, alourdi de secrets ou de révélations foireuses. Je n’aurai pas dû prendre de bière, ça ne me convient pas, je manque d’entraînement … Je me verrai bien donner la Communion à la bière !? Je perds un peu le fil. Le brun me demande si ça va ? « Tout va très bien, merci ». J’invente une histoire de sermon sur lequel je travaille. Le mec se marre. Il avait, un peu, oublié que j’étais le curé de la paroisse. J’aime son sourire, j’aime tous les sourires, mais j’aime particulièrement le sien. Il deviendra un homme magnifique, j’en suis sûr, pas un de ces vantards qui roulent des mécaniques et prennent du ventre sitôt coincés dans une histoire. Les gens se trompent lorsqu’ils imaginent la religion triste. Dieu aime la beauté, comme le diable, mais il l’aime sans apprêts, sans mise-en-scène. Le Christ était beau, je le sais. Robin se détourne après m’avoir offert à nouveau un sourire. C’est  tellement cliché : le curé et une jeune mec, tellement facile à mésinterpréter, et les potes de Robin de lui crier « alors ? t’as fini de jouer à Batman … » Rires. Un peu facile mais je souris aussi. Personne ne le voit ; je file à grands pas et laisse la villa Sarasin derrière moi. Je m’esquive par le parc, je vais slalomer à travers les rues calmes du Petit-Saconnex, la jolie banlieue mixte  et, miracle, heureuse. J’espère revoir Robin à la messe. Peut-être sera-t-il frappé par les mêmes choses que moi, le rapport au disciple préféré, le plus jeune, le plus colérique, le plus beau. « Femme, cet homme sera désormais ton fils » ; « … désormais cette femme sera ta mère » ; « … je ne suis pas digne de te recevoir mais dis seulement une parole et je serai guéri … ». Ça saute aux yeux pourtant ! Il y a encore ces histoires de sang, de filiation mystérieuse, de communauté de garçons, et Marie-Madeleine, et Lazare qu’Il aimait.  Ce n’est pourtant pas ce que l’on croit. Je sais qu’Il attend, sous le dôme de la chapelle, sous la rosace en étoile, Il attend des garçons comme Robin, de beaux garçons capables de convertir les foules, des garçons capables de séduire les femmes et de comprendre leur désir, des mères qui transmettront leur amour du Christ à leurs enfants. Je n’aurai pas dû prendre cette bière, c’est là que je me dis que je ne suis pas seul, l’autre type plus vieux, émerveillé et inquiet … éveillé et inquiet serait plus juste. Ce n’est pas Toi, Seigneur, ce n’est pas l’autre, c’est un homme qui vient bien avant moi, un homme qui a besoin de moi ! Ses prières sont venues jusqu’à moi ?! Il y a la légèreté d’une après-midi d’été autour de lui, et de la musique, Chopin … Schönberg voire Debussy. Il n’est pas très éloigné du gamin de seize ans, le danseur que j’ai trouvé en moi à mon éveil … Hé, voilà exactement le genre de choses qui plairaient à la presse poubelle : «  Le prêtre s’est réveillé avec un gamin de seize an en lui ! » Je suis un Deus joculator, un saltimbanque, un dominicain et je viens à toi mon Aimé, je vais m’arrêter un instant sur ce banc, quelques minutes, derrière Ta maison, le parc où parfois, dans la pénombre, si près de Toi, s’étreignent de jeunes couples, quelques soupirs étouffés, froissement de vêtements. Je n’aurais vraiment pas dû prendre cette bière, certainement un mauvais coup des gamins, je n’étais pas visé mais Robin, il m’a passé son verre, il n’y avait pas encore touché, MDMA, ou un truc du genre. Je vais commencer par dormir un peu, juste cinq …