« Rumeurs » est un roman de dame, un petit texte
resserré, pseudo-épistolaire car personne n’écrit de telles lettres, au XXIème
siècle, à moins qu’il ne s’agisse de lettres publiées, d’un travail littéraire,
une petite touche poseuse. Et Louise Anne Bouchard sait fort bien mettre en
scène si ce n’est sa vie du moins son esprit caustique. La trame ? Une
histoire de filles, deux sœurs brouillées pour de mystérieuses raisons, des
chemins de vie qui bifurquent, une rancœur … de filles … Et l’une a extrêmement
besoin de l’autre. Le beau prétexte.
Le style de Louise Anne est brillant, incisif, efficace,
emplit d’une lumière atlantique, un grand bonheur. On aimerait lire durant des
pages et des pages la description de Montréal, de ces Amériques sous une plume
francophone sagace débarrassée de la brocante du régionalisme et des
atermoiements ruraux sur le vrai goût, la vraie vie, les vrais problèmes. Il
n’y a pas que le Canada dans ces pages, on voyage, Tessin, Patagonie, dans un
style toujours aussi savoureux et coloré.
Cette belle plume que d’aucuns connaissent par des billets
facebookiens drôles et acerbes se perd toutefois dans quelques clichés de la
féminité accomplie et exacerbée (cuisine, fête, sexe). Et je ne vous parle pas
de la complaisance œdipienne avec laquelle les deux soeurs évoquent leur
descendance masculine, au secours Dr. Freud ! Mon Dieu, mais laissez
respirer ces garçons. Il y a aussi quelques délires stériles sur la direction
d’orchestre ; ça peut être intéressant mais ça n’apporte rien au texte, et
le chef d’orchestre dont il est toujours question se nomme
« Siffredi » ?! Après une brève googleisation, je ne trouve
qu’un surfeur, un homme politique et le fameux acteur porno. Soit, ce dernier
travaille aussi de la baguette mais je ne pense pas que la facétieuse et
hyper-féminine Louise Anne Bouchard pensait à lui.
Quel dommage que « Rumeurs » ne comptent pas une
quinzaine de pages supplémentaires. On aimerait cheminer encore un petit bout
avec l’autrice, on aimerait se laisser raconter son Canada, Léonard Cohen, le
mont Mont-Royal. Ces « Rumeurs » laissent une saveur prégnante en
bouche et me confirment de plus le grand talent de Giuseppe Merrone, monsieur
BSN Press, une maison d’édition qui sait cultiver son style, un mordant certain
et tout le talent de ses auteurs.
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