Autour de la piscine, au restaurant, sur les coursives, dans
les bars, au théâtre du navire, partout, l’affront de la jeunesse, 15-25 ans à
peu près, un peu plus. Des garçons poseurs, préoccupés de leur propre pose, et
paradoxalement resplendissant ; des garçons bruns, châtains, bien faits,
bronzés, élégants, séduisants. On ne brille pas de cette manière avec son
cerveau, ou sa culture. Ces garçons vont si bien avec la mer, l’horizon, le
ciel et la décoration un peu vulgaire du « Musica », décoration parfaitement
identique à celle des autres navires d’une catégorie identique de la flotte
MSC.
Bon nombre de ces merveilleux garçons occupaient le pont
supérieur bâbord, lors de la sortie du port de Venise. Ils étaient perdus parmi
la masse des croisièristes photographiant à qui mieux mieux la Sérénissime en
contrebas. Je me tenais parmi cette foule, au second rang, encombré d’une tasse
de thé. Le bateau s’est dirigé sur la Giudecca , l’a dépassée, puis a contourné
Saint-Marc avant de filer vers le large et quelques îles que je n’ai pas su
reconnaître. J’ai été frappé par l’inclinaison marquée, voire dangereuse de
plus d’un clocher.
La ville était belle, attirante, intrigante, souvenir de « La
Mort à Venise », évidemment, forcément et souvenir d’une conversation
facebookienne récente au cours de laquelle je disais mon peu d’admiration pour
la cité des doges, noyées sous le tourisme de masse et l’aqua-alta, comme une
célèbre courtisane dans le coma après un AVC et néanmoins entreprise par des
cohortes de touristes asiatiques au milieu de son incontinence. Je ne retire
rien à mon jugement ; je relève in petto que, si j’en avais le temps, j’ « entreprendrai »,
moi aussi, volontiers la comateuse. Les passagers – mes compagnons – de ce HLM
flottant agitaient joyeusement la main en signe d’au revoir à l’attention des
fourmis humaines cheminant tout en bas ou empilées dans les vaporetti. Seuls
leurs répondaient d’autres touristes alors que les Vénitiens tentaient de faire
mine de ne pas voir cette espèce d’orque obèse de trois-cents mètres sur trente
(maître-bau), sur soixante, à vue de nez, animal contre-nature au sommet duquel
je me tenais avec quelques centaines d’autres, Cy. et ses parents ; ces
derniers un peu plus en retrait du bastingage, à l’ombre.
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