J’ai un scoop, Lador
a un fils, un fils qu’il a eu conjointement avec Aldous Huxley ; cet
enfant miraculeux s’appelle Stéphane Bovon. En bon fils, il a décidé – en dépit
de son goût pour la BD – de suivre les traces de ses pères et de publier un
roman, aux éditions Morattel, digne d’eux. C’est ainsi que les lettres françaises se sont vues
enrichies d’une sorte de nouveau Meilleur des mondes version ramuzienne.
Gérimont débute
sur un prénom incongru et un patronyme très local. Scène d’intérieur, un auteur
de BD met la dernière main à son nouvel album. Le lecteur découvre le héros et
le lieu de l’action, ou de la non-action à ce point du récit. Il y a juste ce
léger quelque chose de décalé, les prénoms imprononçables, mais bien sûr, nous
sommes dans une satire néo-voltairienne déguisée en intrigue policière. Une
amorce tout à fait réaliste et le reste à gros traits afin de d’accuser – en
plus du trait – le système, l’immobilisme de la politique helvétique, la
stérilité d’une société efficace et si peu pourvue de créativité. N’y aurait-il
pas une critique de la politique culturelle officielle ? L’analyse tombe
juste avant de s’élargir à une critique des utopies politiques. Bovon imagine
une sorte d’équilibre social basé sur le bon sens, le prédéterminisme et une
paix forcée, une paix de plomb gentillette à la limite de Huxley et Ramuz.
Notre auteur est
un humaniste éclectique et gourmand doublé d’un pédagogue passionné. Il parle
peinture avec amour, en amateur éclairé. Il nous offre un petit Picasso, le
cloître de la cathédrale de Barcelone, une œuvre de jeunesse, propriété du
Musée Jenisch, à Vevey. Il profite aussi de ce roman au souffle épique pour
nous expliquer son travail de bédéiste, pour brosser un historique du 9ème
art, planche à l’appui (expliquées et non reproduites). Et c’est ainsi que l’on
apprend l’importance de l’ellipse, et quelques autres ficelles de la narration.
Bovon est un miracle de la culture vaudoise, une perle, un doux enragé comme il
en arrive parfois. Gérimont, œuvre singulière, mérite votre lecture, votre admiration
et votre affection.
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