Dernière
ligne droite avant les élections, les résultats tomberont dimanche prochain.
Deux possibilités se présentent à moi. La première, au hasard, je suis élu !
Je reste conscient, à l’instant où je vous écris, des chances très relatives de
mon succès face aux urnes. Donc, je suis élu, je deviens l’un des 150 députés
de ce canton. Que vais-je faire dans ce cénacle ? parmi les rangs de « ce
parti ! », comme ils disent, ceux qui se donnent le droit de penser,
de prendre la parole, de pérorer du haut de leur bien-pensance et de faire la
morale à tout un chacun. Certains d’entre eux lancent « tout, sauf l’UDC »
sans aller plus loin, restant ouverts à toutes les dérives sectaires qu’imposent
leur vision du monde ; une vision généreuse, altruiste, pensent-ils. Mais
qu’en savent-ils ? Se sont-ils déjà retrouvés face à un réfrigérateur vide
le 15 du mois sans savoir comment le remplir d’ici la prochaine paie … ou les
prochaines indemnités chômage, ou l’aide sociale ? Ils se gargarisent de
mixité depuis le salon de leur petit pavillon de banlieue à dentistes, antiphonent
les louanges de la mobilité douce, des transports publics alors qu’ils se rendent
au travail en berline hybride … Et savent-ils ce que c’est d’être gay dans
certains milieux ? dans certains quartiers ? Comme disait
grand-maman, les chevaux se battent à l’écurie quand il n’y a plus d’avoine.
La maison
ne brûle pas, encore. Certains jouent avec des allumettes, parce qu’ils se
croient très malins ; d’autres laissent un peu partout des bougies
allumées, sans surveillance, ils trouvent que ça fait joli dans la nuit, « c’est
plus accueillant pour le visiteur inattendu ». Bref, j’ai choisi le parti
qui a décidé d’installer un extincteur à poudre dans l’entrée, des couvertures
étouffe-feu dans la cuisine et des détecteurs de fumées dans les chambres, tout
en prévenant sur les dangers d’incendie domestique. J’ai choisi un parti qui me
laisse m’exprimer, qui, au risque de me répéter, accepte mon orientation
sexuelle, ma foi catholique et un esprit parfois piquant. Mon histoire personnelle,
mon milieu (modeste), mon parcours m’ont rendu attentif à deux ou trois choses,
je crois savoir lire entre les lignes, j’y ai laissé quelques illusions, une
certaine innocence mais pas la foi, ni la conviction de pouvoir être utile,
savoir prodiguer les soins que l’on m’a parfois sèchement refusé … Pas de
pathos. Je ne suis pas un révolutionnaire, je ne suis plus un révolutionnaire,
je me suis converti à la realpolitik.
Seconde
possibilité, le cas de figure le plus vraisemblable, je ne suis pas élu. Il me
faudra, dans un premier temps, supporter les petites phrases amicales du genre « mais
tu n’avais aucune chance » ou « les
gens veulent autre chose », sous-entendu « n’importe quoi sauf toi »
ou « c’est pas un peu frustrant toute une campagne, autant d’efforts pour
rien ? » Mais bien évidemment, je suis la reine des quiches, c’est
sûr, j’ai voulu me faire mousser, j’ai vu de la lumière, les petites bougies du
précédent paragraphe et j’ai voulu rentrer. Ah ! les amis, les proches,
les soutiens de toujours et leurs pensées positives. Du coup, ça donne envie d’aller
voir ailleurs. Si je ne suis pas élu, j’ai décidé de prendre des cours de
catalan et de flamenco. Dès la fin de mon mandat de conseiller communal, je
mettrais volontiers le cap sur la Catalogne. La très catholique Espagne, un
climat plus clément, pour peu que je décide Piou-piou à me suivre, Lou’
adorerait courir sur la plage. J’aime Barcelone, j’aime ce peuple, j’aime l’Espagne
et j’aimerais susciter un parti royaliste catalan. Je me verrais bien mener les
Catalans à un accord avec Madrid du genre Autriche-Hongrie, une unité avec la
couronne et tout le reste de séparé … La suite au prochain épisode.