Voici le roman subversif de 2015, loin devant les
gribouillis de littérateurs agités, imbibés ou non, sous influence ou non,
portés sur le sexe ou juste vantards : aucun d’eux n’arrivent à la
cheville de Dubath avec son « Des Geôles ». La presse est quelque peu
passée à côté, les libraires un rien moins et comment atteindre son lectorat
lorsqu’on n’est pas invité à faire la roue sur des plateaux de télé locale,
d’autant plus lorsque l’auteur jouit d’une syntaxe exigeante et use d’un riche
vocabulaire.
Il est nécessaire de goûter le verbe walsérien de notre
homme, sa sensibilité à fleur de plume, cette prise de risque maximale qui
consiste à se livrer, sans faux semblant, à ses lecteurs, à travers des sortes
de didascalies à l’intrigue. Il y a le Dr. Raoul Aeschlimann, le criminel
Albert Wasser, Mlle Rietberg, assistante sociale à la prison de S. et Mlle
Juliette, une perruche, compagne du détenu – à perpète’ – Wasser. On se trouve
dans le huis clos d’une prison, du milieu carcéral, du carcan social, des
Grisons. Le Dr. Aeschlimann tient de l’antihéros social comme aimait les
décrire Robert Walser. Le bon Raoul est, soit, médecin, longue carrière, mais
sans la blouse blanche du chercheur ou du chef de clinique arrivé. On pressent
que la pratique personnelle de son art l’a mené à exercer en prison. Le bon Dr.
se met en marge, volontairement, par dégoût modéré du système, de ses
complaisances : le cœur d’un juste, d’un pur bat dans sa poitrine.
Dubath nous laisse entrapercevoir les raisons de
l’incarcération de Wasser, crime sadique à caractère sexuel, du pain béni pour
les psypsys à taulards, les sociologues, les je-ne-sais-trop-quoi-o-logues, du
joli monde qui exerce avec assurance et de confortables salaires. Et si le
patient leur échappe : bourrez-le de calmants. Et on passe au suivant. Et dans la bonne
humeur. Toute l’horreur du gentil système nous est montrée, démontrée, cette
horreur est juchée sur des hauts talons qui claquent, Mlle Rietberg, la cruche
de service, avec cette bonne parole réconfortante à la bouche, le goût de la
soumission helvétique, la grandeur nationale : se faire nabot face à la
montagne.
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