6ème édition du Livre sur les quais, 3ème
pour moi, toujours autant de moments dont il faut se souvenir. Retrouver – pour
de vrai – « les potes » : Yvan, Florian, André, Max, Christophe
ou Jean-François, pendant, après ou entre deux verres, échanger des propos
gaillards parce que la littérature ne s’écrit pas dans les monastères même si
vous tenez des propos très corrects au fil de vos pages. A faire commerce avec
ses pairs, on apprend à connaître son œuvre, à déterminer ses attentes. Je ne
suis pas un « vendeur », rien de pire selon moi que ces auteurs qui
bondissent à la face du badaud comme des pantins hors de leur boîte, ce me
semble terrible de vendre un livre comme du poireau à la criée. Tant mieux pour
l’éditeur … Je me sais (un peu) lu même si je n’ai, je crois, jamais eu les
honneurs d’une vitrine. Je n’existe même pas dans les rayons de la bonne librairie
de la place. Non, je ne suis pas allé vérifier expressément, je me suis cherché
il y a une heure à peine, alors que j’étais passé acheter le second volume de « L’Homme
sans qualité » et terminer la lecture des trois dernières pages du tome 1,
que j’ai oublié à Vevey dans l’un ou l’autre des établissements où je « prêche ».
Je suis donc sorti avec un nouveau pavé de plus de 1200 pages sur l’air de « nul
n’est prophète en son pays ». Je n’en retire ni gloriole, ni dépit. Au
chapitre des préoccupations égotiques, j’ai cherché mon nom dans une somme, une
épaisse recension à propos de la littérature romande. Je m’y suis trouvé, par
deux fois, perdu dans une énumération d’auteurs, la première sous une
affirmation fallacieuse. Le responsable de ce docte dictionnaire n’a
certainement jamais eu connaissance de mon premier texte, de l’autofiction, il
y a 20 ans. C’était osé de la part de cette maison d’édition, j’avais eu droit
à un bel article dans le Nouveau
Quotidien, normal, j’avais 25 ans mais l’époque n’était pas aussi jeuniste
qu’aujourd’hui, on m’a vite oublié. Je m’étais même fait remettre à l’ordre par
l’éditeur en personne, on me reprochait mes initiatives de promotion auprès des
libraires. Finalement, je crois que la maison en question regrettait la
publication d’une autofiction gay et cherchait à la faire oublier.
Ce livre existe. Les huit suivants de même. Peut-être pas
aussi aimés qu’ils le devraient, je suis un père négligent. Parfois, j’accepte
l’expédient de la maison participative ! Voilà qui est assurément pire que
la vente de poireaux sur un étal de marché. J’ai des lecteurs par
inadvertances, des rencontres par hasard. Alors que certains ont de belles
formules toute faite et bien rôdées pour un titre coup de poing, je me retrouve
derrière les piles immobiles de cinq ouvrages aux dénominations étranges,
exotiques sans être séduisantes. On s’arrête, plus souvent pour moi que pour
mes romans, et je raconte un peu la trame de celui-ci, de celui-là, la
non-intrigue du dernier, raconté comme cela, le texte me paraît plat, je manque
pouffer de rire, je repense à l’une des scènes culte du Père Noël est une ordure, « Vous m’avez raconté cette soirée
avec brio ! Avec qui ? Avec brio, c’est une expression … ». Je
me pince l’intérieur de la joue et poursuit la présentation alors que mon très
improbable lecteur a déjà les yeux qui glissent sur un titre qui l’a accroché
et le propos assorti qui fait mouche.
Neuf titres en vingt ans, dix si j’y compte mon feuilleton
en ligne, « Dernier vol au départ de Tegel ». Je les ai alignés sur
le boukhara au pied de mon lit, un tapis aux reflets précieux et discrets,
exactement ce qu’il faut à … mon œuvre. Je voulais juste voir « ce que ça
faisait », tous alignés, dans leur ordre de parution. Et j’en ai fait une
photo, pas mal. Je ne sais pas vendre mon travail mais je sais communiquer sur
mon réseau social favori ; je me suis dit que je profiterai de l’image
pour illustrer un billet, celui-ci, dès que j’aurais le temps, le calme, le
salon d’été et la vue sur le port, le lac, la frise des montagnes. Dire merci
comme il se doit aux organisateurs du Livre sur les Quais pour leur invitation,
leur intérêt, leur attention ; dire merci aux potes, mes pairs, pour leur
bonne compagnie ; dire merci à mes lecteurs, ceux que j’ai pu rencontrer
et ceux qui, avec discrétion, ont pris l’une ou l’autre de mes dernières
publications. Merci à vous tous. Je ne participerai pas à la 7ème
édition, je me contenterai du cocktail
inaugural en tant que conseiller communal, pour peu que les Morgiens mes
concitoyens me réélisent. Je travaille au dernier volet d’un roman uchronique,
Hélice Hélas quand tu nous tiens ! Rien qui ne sera sous presse avant l’automne
2016, ou Noël, ou le printemps 2017. A tantôt, donc.
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