Alex Beaupain |
« Quel malheur de parler français ! » Regard interrogateur de Cy, déclaration vérité sur une route de campagne, une heure du matin passé et Alex Beaupain sur France Inter. Il est tard, après une longue semaine, mais je suis sincère et sens sur moi le sortilège mélancolique de cette culture française (la culture suit la langue) qui n’en finit pas de s’éteindre dans les tous derniers éclats de la mitterrandie, un ultime sursaut universaliste.
Tous les transits à potron-minet ne m’offriront jamais la moindre possibilité de fuite ; Berlin même ne me libérera jamais du joug du français, de cette langue admirable et triste que je maîtrise avec aisance, élégance et passéisme. Je sais que violenter la grammaire ne sert de rien, réaction désespérée de jeunes auteurs, chiens fous littéraires qui tirent rageusement sur leur chaîne. Et la voix douce, légèrement dissonante, le ton affecté d’Alex Beaupain qui me racontent mon exil intérieur. Jamais je ne partagerais la jeunesse de la culture allemande, sa vitalité ni le succès bon-enfant des sociétés anglo-saxonnes, cette manière de s’offrir au monde et de le bouffer avec appétit.
Quel malheur de parler français, d’être pris dans les filets d’un certain état d’esprit, une logique dont j’essaie de me défaire depuis dix ans, depuis ma rencontre avec Berlin. Autant se le dire : aucune échappatoire n’est possible. Au mieux, je serai juste un naufragé que l’onde renverra sur les côtes de cette culture au charme si délicat, photos jaunies, clichés doucereux et proustiens, thé, madeleines, Art Nouveau, après-midis fleuries. Et des larmes sucrées …
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