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jeudi, novembre 27, 2014

Canicule - narcose - parano

Non pas relire mais lire, découvrir le texte, le livre, l’objet même si l’on en est l’auteur. L’expérience est troublante, le texte résonne au-dedans et au-dehors. Je reconnais chaque mot mais me laisse embarquer dans le récit, l’errance de Maxence, je traverse ses interrogations, son malaise, sa divagation berlinoise et intérieure. Je redécouvre au passage les mésaventures des autres protagonistes. Quelques effets de ruptures mais le flux reprend le lecteur l’emmène plus avant, parmi les alluvions des histoires passées, un matériau auquel il est sensibilisé, à lui de faire du lien, d’imaginer ce qui est suggéré.

L’exercice n’est pas gratuit, une invitation à « Entre les Lignes », Espace 2, pile avant un rendez-vous de contrôle chez mon orl, rapport à mon opération de lundi, ce qui en rajoute à la  polysémie et au renouveau de « Canicule parano ». J’avais demandé à l’anesthésiste d’y aller léger sur la morphine et ses dérivés, vu mon état des deux derniers jours, il a dû la remplacer par de la coke ! Blague à part, j’ai décidé de me remettre à jour, maîtriser mon sujet, retrouver le fil du récit, sa saveur exactement, renouer avec Maxence, mon bon Max dont j’aimerais avoir des nouvelles, savoir de quelle manière il a su négocier son retour ? La suite de son existence ? Un énième nouveau départ ? Et la tante Berthe ? Andrée ? Ivona ? L’abbé Jean-Marie ? Elisabeth, la sœur de feu Monseigneur G. ? Je ne connais pas la suite de l’histoire. Sincèrement, j’aurais aimé la lire et pourquoi pas sous la plume d’un autre.


J’ai retrouvé mes intentions, la sensation d’abandon, la torture de cet été lointain à présent. Et Berlin qui a tant changé depuis. Le café Möhring n’existe plus, les bazars près du Zoo Palast ont fait place au « Bikini Berlin », un centre commercial design, hypster et bobo aménagé dans le bloc fifties’ préservé. J’ai photographié une saison, un jour particulier entouré de quelques vignettes : Barcelone, Bâle et Lausanne aussi. L’inachèvement de mon récit en fait sa force paradoxalement. Qu’est-il arrivé à Max ? On sait si peu de lui, de son histoire, son enfance, quelques détails disparates, des images mais rien qui ne lui donne du corps. Envie d’en savoir plus …

samedi, janvier 20, 2007

Une petite porte


Cette après-midi, promenade au jardin botanique, les serres, puis le parc de l 'ancien BIT, le parc Barton, la Perle du Lac, ma Genève, celle d'il y a bien longtemps, du temps de Gregory. Ma Genève dans cet hiver paradoxal, sous des cieux plombés, la lumière rase pareille à celle d'une belle fin de journée estivale, et cette impression profonde, pleine et puissante de me répandre dans le paysage, le bitume du chemin, les arbres, les promeneurs, les flots calmes du petit lac. Sentiment de perméabilité et de légèreté, les sens lâchent du leste; la lecture de leur rapport précis devient floue, caduque ... Gregory me manque mais sans tristesse ... Je me suis dit qu'il faudrait toujours garder une petite porte dans son existence, une sortie discrète, le passage anodin vers "autre chose", vers des saisons irréelles, des pensées très simples et pures à la fois, des couchers fantastiques, des crépuscules urbains où il suffirait de s'assoupir deux minutes dans le tram pour partir, mine de rien, dans une autre histoire, un scénario épuré, et tant pis pour la redondance, une vie banale et savoureuse genre scène parisienne à la mode Truffaut ...

Et cette promenade, le parapluie comme une canne, impression de donner de l'exercice à ma "fibre lyrique", de la profondeur sensible à une vie - pour une fois - très routinière, réciter quelques vers de Lamartine au-dessus du lac, l'hygiène de l'auteur, la dignité de Thomas Mann, ah ! le modèle de toujours. Pour l'aspect récréatif, il y a le mythe eighties' quasi eschatologique, le néo-décadentisme mitterrandien, une autre manière de retenir le temps, de le nier ... En tout cas ne pas subir son écoulement continu et monotone. Quand j'avais 15 ans, attendant romantiquement qu'un imbécile de prince charmant ne manque me rouler dessus avec sa Roll's Corniche blanche, puisque ça ne venait pas, j'en ai conclu qu'il fallait créer l'événement ! Je ne pense pas avoir appliqué ce judicieux conseil jusqu'à présent. J'ai su négocier d'une manière plus ou moins performante ma place, la façon dont j'ai voix au chapitre. Provocation et maladresse, courage et sincérité, sensibilité et raison, paresse et arrivisme ? La pièce n'est de loin pas terminée et je vous promets, chers lecteurs et chers suppôts moscovites, un joli coup de théâtre au 24 janvier !