samedi, février 24, 2007

De la campagne française, de la censure et de l'inquisition vaudoise


Chers amis, chers lecteurs, chers suppôts moscovites, bonsoir ! Permettez d'excuser mon (trop long) silence mais je viens de loin, exil oblige et je me dois aussi à mon autre public. De toute manière, notre campagne cantonale n'a rien de trépident, un point pour bonnet-blanc, un point pour blanc-bonnet et tout le monde est content parmi notre exquis consensus national, gentil petit système que nous envient tous les États plus ou moins démocratiques du continent. Par bonheur, nous avons des voisins en campagne, des voisins qui nous ignorent ... comme une sorte de tare honteuse. J'en veux pour exemple les commentaires de circulation sur les grands axes autoroutiers européens donnés par France Info. Les auditeurs sont prévenus du trafic annoncé, trafic fluctuant selon les vacances des différents pays européens ... Ah, oui, j'oubliais, nous sommes des Martiens pour nos voisins français. Quoiqu'il en soit, pour en revenir à France Info, on nous parle du transit des Luxembourgeois, des Belges, des Néerlandais, pour prendre des nations de taille comparable, on nous parlerait volontiers des Lapons si l'on en trouvait au moins un ! mais des Suisses, jamais ! Pour les enfants de Marianne, la Suisse se résume à la promesse d'un confortable salaire pour qui réussit à s'y faire engager. Je n'accuse personne, on aurait tort de se priver ! Donc, la campagne présidentielle française suscite tout notre intérêt. Pensez donc, une élection avec des conséquences politiques, et des vraies, pas simplement des histoires de géraniums ou de réverbères, ça nous passionne par ici. Peut-être que notre gauche (bonnet-blanc ou blanc-bonnet ?) se console de son verbe pâteux à l'écoute du verbe scolaire de la candidate socialiste et notre droite peut observer les effets grandeur nature du discours à l'emporte-pièce du candidat UMP sur notre molle population, jusqu'où peut-on aller ?

Nos voisins ont le goût de la querelle partisane, ma foi, on s'occupe comme on peut ! Par ici, lorsque le bon peuple s'ennuie, il saute dans un long courrier et va se faire bronzer sur une plage pour dépliant publicitaire de rêve. Il est clair que ce genre de plaisir n'est de loin pas à la portée de la bourse du Français moyen. Durant son temps libre, il profite de cultiver son esprit partisan et des convictions politiques toujours prêtes à mettre l'Europe sans dessus dessous. C'est d'une grande drôlerie et, en parallèle à la chose politique pure, en période de campagne, notre voisin français se préoccupe beaucoup d'évaluer le temps de parole de chaque candidat et de ses soutiens actifs. Il finit toujours par se plaindre parce qu'il croit déceler un honteux favoritisme partisan. Cela donne lieu à des billets rageurs dans les colonnes du courrier des lecteurs ou sur le bureau des différents organes de contrôle. C'est alors une foire d'empoigne et d'appel à la censure à laquelle ne cède pas les sages de la république. Vive la France et tant pis si le bien-être helvétique pose encore problème à cette grande nation.

Nouvelles du terroir. En ce doux pays de Vaud peuplé de tant de sémillants bovidés, il est à relever la sagesse (dirigée) de la jeunesse ... Figurez-vous que, au cours d'une émission de radio, un préfet se flattait de la réussite de sa politique de prévention en matière d'alcool et de marijuana auprès de la jeunesse locale. Cette victoire n'était pas le fruit d'une campagne de prévention, ni de la mise en place d'un discours responsable ou d'activités épanouissantes ... Que nenni ! Flicage blogesque, berk; je n'ose imaginer la maréchaussée perdue dans l'orthographe approximative des messages rageurs d'une jeunesse forcément en rupture, forcément révoltée. J'y vois une insulte à la liberté d'expression, le viol de l'intimité de ces jeunes gens (mêmes s'il n'ont rien de spécial à raconter) et, surtout, une infantilisation des ces adultes en devenir. L'écrit est un indice, une accusation parfois, mais en aucun cas une preuve ! Et je suis sûr que personne n'a suggéré de corrections orthographiques aux auteurs des blogs surveillés.

Moscou pourra reposer son oeil, pour la semaine qui vient du moins. Je vais pratiquer les trois C à Madrid. Petit message aux homophobes évangélistes ou protestants intégristes qui se seraient égarés dans ces pages, les trois C signifient : Cul, Culte, Culture. Cela veut dire que je vais dépenser une partie du salaire que me verse l'Etat de Vaud dans des établissements gay madrilènes, dans des édifices religieux catholiques madrilènes et dans des musées madrilènes. Bonnes vacances à tous.

jeudi, février 15, 2007

Du Stress de la jalousie et de l'inconséquence


L'autre jour, tout en cheminant en compagnie d'une collègue, j'évoquais la mine peu engageante de la plupart des candidats sur les affiches électorales; la faute à leur directeur de campagne certainement ! Quoiqu'il en soit, avec des faciès dépourvus de tant de séduction, il est à se demander à quoi ressemble la vie sentimentale de nos candidats ! Ma collègue releva que ce n'était pas très important en l'occurrence, il ne s'agit que d'une élection et pas d'un "blind date". Après une nuit de réflexion, je me suis rappelé d'une petite histoire que mon parrain (brillant helléniste) m'avait contée : dans une république antique, on avait refusé à un général grecque le commandement suprême car il n'avait jamais été sodomisé; comment faire confiance à un homme qui n'a pas connu ce genre de plaisir ! J'ai donc reparlé de tout cela ce jour avec ma collègue qui, entre temps, avait modulé son opinion. "Qu'il couche ou pas, ce n'est pas une garantie absolue de non-frustration, c'est toutefois un indice convaincant de leur équilibre !"
Restons encore un peu "au-dessous de la ceinture", on en apprend souvent beaucoup à ce niveau-là. Dans un quotidien gratuit (qui, je me répète, a déjà cette qualité à défaut de mieux), un article annonçait la présence dans une boîte de Lausanne, d'une "DJette" ex-star du porno. Le fait en soi n'a rien de stupéfiant surtout si la dame a du talent. Je lui trouve un joli plan de carrière. Quand bien même ne serait-elle pas une "DJette" fameuse, qu'elle profite donc de son renom, elle a suffisamment "donné" de sa personne pour jouir de cette sinécure ! Mais vous ne le croirez pas, un fâcheux, chanteur local (râpeur de carottes) de son état, celui-là même qui sodomisait par clip interposé l'un de nos conseillers fédéraux, s'est inscrit en faux contre la reconversion de l'ex-star du porno. " Alors se faire voler la vedette par une simple actrice porno qui surfe sur sa notoriété, ça la fout mal ..." Notre artiste ne serait-il pas un rien jaloux ? Et qu'entend-il par "simple actrice porno", je décèle une once de mépris moraliste. Quoiqu'il en soit, en matière de pornographie, notre homme a déjà largement dépassé la mesure. Il se justifie en évoquant la contestation d'une "certaine Suisse"; je devrais peut-être lui proposer mes services ... non, rien de ce que vous êtes en train d'imaginer ! Je pourrais lui donner des cours de contestation créative et de critique cinglante et drolatique.
Remontons quelque peu jusqu'au niveau des convictions - quoique j'aie connu bien des membres de l'intelligentsia et de la nommenclatura qui les portaient bien bas et se les mettaient au ... enfin, qui s'asseyaient sur leurs convictions. Entendu hier à la radio notre grand virtuose de la râpe à fromage s'exprimer sur un ton nonchalant à propos de tout et rien. Arrive sur le tapis l'affaire de la censure de "Salò ou les 120 journées de Sodome" et la journaliste de demander son avis au chanteur local à propos de la formation d'un comité de lutte contre la censure. "Si ça peut leur faire plaisir à la fin de la journée ..." Notre grand pourfendeur de la droite très à droite, le contempteur du racisme et de l'intolérance réduit un phénomène de mobilisation sur une question de principe, sur une question fondamentale à un petit passe-temps quasi inutile ! Je croyais qu'il s'agissait d'un chanteur à texte ? c'est à dire de l'un de ces don Quichotte toujours prêt à pourfendre les moulins à vent de son verbe. Je lui trouve bien de l'inconséquence et soupçonne que ses prises de position publiques ne soient pas dénuées d'intérêt marketing. S'il n'est question que de notoriété, il aurait dû faire comme la DJette, et commencer par une carrière dans le porno !






mardi, février 13, 2007

Du paysage, du MP3 et de la censure !


Puisqu'il en est ainsi ... Ce journal en ligne, qui m'a été un compagnon de plus d'une année, un ami, une écoute, un soutien, ce journal du fait de l'indiscrétion et de la malveillance d'une certaine classe de mon lectorat, "les suppôts moscovites" comme j'aimais à les appeler avec humour, change donc d'orientation.


En ma qualtié d'auteur, d'auteur publié, j'ai toujours lutté dans ces lignes, ces articles et dans tous mes écrits pour la liberté d'expression. Je sais que, parfois, mon propos a pu choquer, car il tombait juste ! Lassé par l'idée de trouver à l'autre bout de cette connexion un quarteron de misérables mal-intentionnés, je réserve mon émotion et mon amicale sincérité à un autre blog. J'ai pris le chemin - symbolique - de l'exil.


Quant au "Monde de Frevall", on voulait m'en faire grief, j'y mènerai désormais une bataille de tranchée et le réserve à la pensée politique du parti de la Dignité. Je sais, cela sonne d'une manière un peu ronflante mais ce n'est pas pire que le ton d'enseignante du primaire qu'affecte la candidate Royale lorsqu'elle s'adresse à nos voisins en meeting ou en interview. J'ai toujours préféré le panache à la pédagogie de bazar de la caste politique en place.


En cette mi-février, qui marque le début de la campagne électorale vaudoise (renouvellement du parlement et du gouvernement), je vais en rester au niveau des affiches. Côte à côte, sur le pont Chauderon, se trouvent le placard libéral et le placard socialiste. Mis à part quelques pauvres détails de typographie d'un code couleur différent(un peu de rouge ici, un peu de bleu là), ce qui ne saute pas aux yeux du passant déjà blasé par cette pollution visuelle (les affiches sont saucissonnées à la balustrade du pont et coupe l'admirable vue que l'on a sur le couchant à la fin du jour), ces deux affiches donc se trouvent être des fausses jumelles. Cela donne la fâcheuse impression qu'un parti s'est offert deux produits électoraux différents histoire de ne perdre aucun client. Pour la droite, un panorama lacustre, pour la gauche un panorama champêtre. Les sourires sont aussi niais et la posture aussi mal jouée à gauche qu'à droite (aïe, l'oeil de Moscou va encore froncer mais est-ce ma faute si graphiquement et esthétiquement ces affiches sont une insulte) . Mon esprit critique m'en a fait l'interprétation lapidaire suivante : "Votez pour nous, blanc bonnet et bonnet blanc, au cas où nous ne tiendrions pas nos promesses électoralistes, il vous restera toujours le paysage !"


Point suivant : le MP3. Un quotidien gratuit (qui a donc déjà ce mérite à défaut de mieux) évoquait il y a peu la prochaine interdiction du MP3 pour les piétons et les cyclistes en ville de New York. Après avoir demandé aux autorités locales compétentes ce qu'elles en pensaient, éclat de rire à Genève. Par contre, du côté de Lausanne, l'un des responsables du service des routes et de la mobilité trouve "la mesure tout à fait justifiée". Il regrette toutefois les difficultés d'application d'une telle interdiction. Je tairai le nom du susmentionné intervenant par discrétion. Les suppôts moscovites pourraient me trouver insultant (voire criminel même si tout le monde sait que le ridicule ne tue plus).


Dernier point et crucial ! Un juge zürichois, après dénonciation d'un club de culs-pincés évangélistes (je croyais que nous avions le monopole de cette engeance sur la Côte) (il s'agit là de l'avis du catholique que je suis), n'a rien trouvé de mieux que d'interdire la projection de "Salò ou les 120 journées de Sodome". Il s'agit d'un acte de censure arbitraire motivée par une pseudo lutte anti-pornographique ! Je vis dans un pays où la justice d'un gouvernement cantonal est capable de censurer une oeuvre d'art; dans un canton où la gauche et la droite sont tant indifférenciées que leurs affiches électorales sont des clones; dans une ville où l'on regrette de ne pas avoir les moyens techniques d'appliquer l'interdiction "justifiée" du MP3 et de tout lecteur de musique aux piétons. Non, attendez, ne me dites pas que la candidate française s'est emparée du pays et l'a transformé en une vaste classe de deuxième année primaire !?

vendredi, février 09, 2007

Sur la tempe


Il suffit ! Et je ne m'adresse pas qu'aux suppôts moscovites, race répugnante s'il en est ! Il suffit avec ce mauvais vaudeville ou la bêtise se le dispute à la méchanceté. Je n'ai pas à porter les frustrations mesquines du petit peuple scolaire, pauvres hères formatés par tant de générations courbées sur le respect dévot de l'autorité, si illégitime puisse-t-elle être ! Il suffit avec l'indignité d'un représentant politique s'abaissant au niveau d'un chansonnier populiste, sans parler des relents d'homosexualité mal digérée, comme si aimer le même sexe tenait de l'insulte. Je suis choqué et en colère et, ce soir, je n'ai que du mépris à offrir à ces systèmes usés. Mon mépris gagne jusqu'aux conseils - pourtant avisés - de mon guérillero syndicaliste, et je me tais quant à l'administration dont dépend mon salaire. Je ne veux pas sombrer dans la vindicte et la vulgarité. Je laisse ces facilités aux jeunes fats qui parade sur la place publique et aux orgueilleux qui s'étalent dans les premières pages de la presse locale. Je n'ai pas à dilapider mon talent d'homme de lettres dans tant de sordide.

Je ne suis pas doué, non plus, pour les seconds rôles à la mode Cassandre, et parmi tant d'agitation, le déferlement des forces du néant et de la médiocrité - voilà pourquoi l'on parle d'une "médiocrité sans fond" - je ne donnerai plus un mot de réplique. Le parti de la dignité sera donc mon dernier geste au milieu de cette foire d'empoigne. J'ai les épaules larges, il est vrai, mais je commence à avoir de l'humeur. Je pourrais en raconter "des vertes et des pas mûres" sur ce quarteron en vue, qu'ils soient aux commandes de l'économie privée, de l'administration publique ou tout sourire sur les affiches électorales.

Il n'est dans mon oeuvre une seule ligne dont je pourrai rougir, dans ma vie sentimentale une seule action dont je pourrais avoir honte, dans ma réflexion politique une seule opinion dont je pourrai me dédire ... Personne n'est fait pour la colère et la mauvaise humeur ... Je suis profondément persuadé que nous sommes tous des étoiles, nous sommes tous des empereurs, je ne force personne mais ne me laisserai pas retenir par une tripotée d'ennuyeux, ni me laisserai désespérer par ce coin de terre, quelle que soit ma peine ... Afin de me sentir les coudées plus franches - je n'ai pas particulièrement la fibre pédagogique vis-à-vis du club des voyeurs moscovites - je vais réserver ce blog à des réflexions plus théoriques, je vais en ouvrir un autre, mes amis me suivront, et des inconnus aussi; je laisserai donc les censeurs mous en compagnie de leur bêtise, ils pourront en faire le tour, cela devrait bien les occuper jusqu'à la fin des temps. Les autres sauront bien assez me suivre, et nous continuerons de partager les larmes, l'amour et l'émotion. En vérité, je vous le dis - je paraphrase un peu - même avec le canon d'un revolver sur la tempe, je me sentirai libre et continuerai de voir les vastes étendues fleuries d'une félicité méritée.

jeudi, février 08, 2007

Présence


Politique ou égrillard, piquant, plaisant et bien d'autres choses ... Je n'ai que l'embarras du choix pour le billet de ce jour ! Et mes contradicteurs ne manquent jamais de me prêter complaisamment le flan. Par "contradicteurs", je m'entends, je pense à ceux dont je pourrais relever les défauts du discours, les incohérences et les petits travers ... Mais je n'épinglerai personne, je n'irai pas même voir du côté de C., village où vécut madame machin, la grosse et son verni de culture, la pose flatteuse de l'élite responsable et tous les poncifs mal rechampis que nous ressortent les élus cantonaux en avant avant-campagne.

Et l'après-midi, à Genève, sous son confortable ciel gris, une visite à J.-M., sa boutique, un café chez Martel, quelques courses, retour Lausanne, dînette chez Jacques avant de courir au cinéma, voir "La Traductrice", un dernier verre en ville ... en ville, je répète ! J'ai encore trouvé le temps de faire avancer mon "concile de pigeons", de finir du repassage, de réfléchir vaniteusement à la tenue de demain, d'après-demain, deux épisodes de "Verliebt in Berlin" pour faire passer le mal du pays, mon pays idéal, celui où je n'ai pas à porter une appartenance quelconque comme une croix, où il me suffit d'être ... Berlin, donc, Barcelone, Zürich, Paris, Bruxelles, Genève quand je peux y passer plus de 24h de suite, et oublier la contrainte du regard pornographique dont "Moscou" salit tout de son oeil inquisiteur et faux-jeton, sans parler de ses suppôts à temps partiel ni de quelques quidams à peine mal intentionnés rencontrés ici ou là qui ne manquent pas de me commenter et de travers ...

Cela faisait longtemps : ce soir, j'aurais eu envie de m'endormir en compagnie, auprès de quelqu'un en particulier, d'être simplement auprès de lui ... être ... Et dépasser ainsi l'ennui de ce jour après l'autre, et après celui d'avant, d'avant tous les autres. Je ne veux pas me laisser figer dans la posture de l'homme arrivé, solidement en place. Légère impression de tirer sur ma chaîne ... La Présence et la liberté me viennent alors d'internet; il n'est pas question de chat de rencontre mais d'une radio en ligne, des chants grégoriens pour seul programme, expression de cette présence chez ceux qui en jouissent à chaque instant de leur vie.

dimanche, février 04, 2007

Le divan de Freud


Je l'ai accepté ! Alors que j'hésite toujours et me fais longuement prier devant tout cadeau inopiné, cette fois, j'ai simplement répondu "merci" sans quitter la porcelaine des yeux, un amour de 40 cm, une pièce en Meissen de la fin du XIXème, brisé en plusieurs endroits ce qui en rajoute à son charme et lui confère une dignité qu'une parfaite conservation ne lui aurait pas accordée. J.-M. l'a soigneusement emballé puis nous sommes sortis, le petit marché aux puces et autres trucs du premier dimanche du mois, Plainpalais, Genève, un peu de fatigue derrière les yeux. On est venu me chercher du fin fond de mon esseulement lettré, cette distance consécutive au temps nécessaire à la conception, au filtrage, décantation ... Superbe isolement, un peu poseur et orgueilleux, rien qui n'impressionne au bout du lac. Je m'y sais différent : moins piquant, critique et cassant. "Tu trouves tout bien" m'a glissé J.-M. lors de notre promenade; un beau soleil néo-printanier, la Brasserie du Rond-Point, envie de me tatouer à l'intérieur un petit dessin de cette belle teinture genevoise, gober l'esprit de la ville, parce que la rencontre est belle, le bonhomme séduisant, la compagnie plaisante et l'échange stimulant. Et ça me fait des vacances, il faudrait vraiment que je puisse conserver cet état d'esprit confortable, cet enthousiasme léger et guilleret, une générosité du regard sur les choses et les gens.


Sitôt de retour à Lausanne, la rencontre d'un couple d'amis, je témoigne de ma préférence pour Genève. Oui, je préfère Genève et sa République à Lausanne et son Pays de Vaud. S'il s'agissait d'un bête choix, l'affaire aurait été réglée depuis longtemps. L'un de mes deux interlocuteurs était d'un avis contraire ... Et je ne sais pas pourquoi, ce genre d'échange a la fâcheuse tendance à dégénérer, la petite guéguerre de tranchées du "pour" ou "contre" se concluant indubitablement par un amer : "Puisque ça ne te plaît pas, va voir ailleurs !" "Autant qu'à finir balayeur, je préfère l'être ici, je serai toujours mieux traité que dans n'importe quel autre pays.", réponse de la bergère au berger que je sers consécutivement à ma critique du "saint" Pays de Vaud depuis mes dix-huit ans. J'ai toujours droit à ces mêmes airs pincés mais, est-ce ma faute si je suis lié, ligoté à ce canton (reconnaissance de diplôme et corporatisme cantonal en matière d'enseignement public obligent). Je crache dans la soupe, peut-être, mais cette ville (Lausanne), ce pays (Vaud) parlent en moi, j'en suis un citoyen irréductible et, de la même manière, je suis un membre irréductible de la famille Vallotton; je suis le résultat d'une somme de qualités et de défauts façonnés par les particularismes de ce terroir. Je le critique, et durement, en connaissance de cause, comme lorsqu'on se fait horreur dans le miroir pour un nez ou une chevelure qui ne nous plaisent pas. Si je pousse un rien plus avant cette démonstration, puisque l'on n'échappe pas à sa famille, la critique renvoie au sentiment - justifié ou non - de ne pas avoir été aimé comme on l'aurait voulu, autant qu'on l'aurait voulu. De divergences en malentendus, de susceptibilité froissée en maladresses, le contentieux se creuse sans pour autant contredire l'appartenance ... Et les mots restent froid, et à dessein; cris silencieux et fuite sur place, merci docteur pour cette séance constructive, nous avançons bien dans mon analyse.