La nouvelle est tombée, mine de rien, mardi matin, un
message sur msn, un vocal, pas possible de l’écouter, j’étais en réunion. Puis
j’ai oublié. Jusqu’à mon retour à la maison, ma table de travail dans la
bibliothèque, un petit chien sur le canapé, l’autre sur le balcon, mille trucs
à faire, normal, vie décousue … ou plutôt vie aux rythmes décousus depuis …
depuis vous savez quoi, ce que l’on nomme pudiquement « la crise ».
Entre la promenade des chiens et se préparer à déjeuner, j’écoute le vocal, il
est suivi d’un nom et d’un n° de téléphone, recevoir mes exemplaires. J’ai de
la peine à croire le message que j’entends. Je sais que les deux dernières
années ont été très compliquées, pour les éditeurs aussi.
Andonia en personne m’annonce donc que « mon
livre est arrivé », qu’elle le trouve très beau et qu’elle espère que je
serai content du résultat ! Le dossier de presse est en cours, le
distributeur va prendre le relai, mais pas d’inquiétude, ceux qui veulent
commander le texte directement auprès de l’Age d’Homme peuvent le faire dès
maintenant. C’est une joie subite et violente qui déferle en moi, un barrage a
cédé, je pense immédiatement à ma mère, décédée en août dernier qui ne le verra
pas et qui l’attendait.
J’en avais parlé dans ce blog en juillet 2019,
préparant déjà le terrain pour la sortie en novembre 2019. Quelques retards
dans la mise-en-forme, recherche d’une couverture et tout le tralala, l’affaire
de 4 mois mais mars 2020 puis tout le reste. « Tout le reste ». Je le
lis à voix haute alors que je le tape à nouveau. J’aimerais en dire tant plus
et, à la fois, je crois qu’il n’est pas possible d’être plus concret. Je
travaille sur ce « tout le reste » que nous sommes nombreux à ne pas
vouloir juste planquer comme une chaussette sale sous le canapé. J’y travaille
en ce moment à très petites touches parce qu’on ne tient pas un cactus à pleine
main. Durant deux ans, j’ai été très occupé, façon « territoire occupé ».
Je m’étais fait à l’idée : Credo
serait un texte pris dans les limbes de notre temps.
A présent, tout peut arriver, je m’en fous : je
suis publié à l’Age d’Homme ! Je suis un auteur publié à l’Age d’Homme
avec un ouvrage dont la couverture est de la main même de l’héritière
Dimitrijevic, mon nom sera inscrit dans le catalogue de l’Age d’Homme parmi
celui de grands auteurs. Je viens de rentrer par le mérite de mon talent dans
un club et tant pis si je n’y occupe qu’un tabouret. Je sais que mes autres
éditeurs ne le prendront pas mal, je pense tout particulièrement à Stéphane
Bovon et à Olivier Morattel. Je ne hiérarchise pas les maisons d’édition mais l’Age
d’Homme, son histoire ! … et mes
rêves adolescents. J’avais envoyé l’un de mes tout premiers manuscrits à l’Age
d’Homme. J’avais 16 ans.
Credo devait
être, à l’époque, mon dernier opus autofictif. C’est râpé. Il y a Construction dont je vous reparlerai et …et bien dansez maintenant sur lequel je
travaille en ce moment. Le pitch de Credo
était simple, j’explique mes convictions d’alors, cette époque d’avant,
quand j’étais élu politique, membre du conseil de paroisse et pesco-végétarien.
Je ne vais pas vous refaire un Credo bis, autant vous le dire de suite :
je ne me suis pas représenté au Conseil Communal, j’ai démissionné de l’UDC, j’ai
quitté le Conseil de paroisse et j’ai recommencé à manger de la viande.
Pourquoi ? Dans l’ordre d’énumération, 1. les décisions politiques conformistes
prises durant « la crise » ont profondément heurté mes convictions
civiques, 2. la direction de l’UDC a soit compris les risques que « la
crise » ont fait peser sur notre Constitution mais les petits élus locaux
n’ont pour la grande majorité pensé qu’à leur cul, leur réélection et les
dernières alliances électorales ont ruiné le peu de confiance que j’avais
encore dans ce parti, 3. notre très Sainte Mère l’Eglise est aussi mal dirigée
urbi et orbi que la politique suisse traditionnelle, 4. mon organisme grandi et
nourri à la protéine animale durant près de cinquante ans a eu du mal à
soutenir un régime qui ne lui était pas naturel, surtout parmi la colère et le
désarroi d’alors.
Mais il n’y a pas que ça dans Credo, il y a la petite musique de notre très chère fin de XXème
siècle, un petit coup de nostalgie pour faire bonne mesure, un trait de vitriol
contre notre grand voisin à l’Ouest, le renouvellement de mon attachement
indéfectible pour la double couronne austro-hongroise, de la vacherie chantournée,
de la peinture, du cinéma, Berlin et Barcelone, un zeste de middle-life-crisis.
C’est chou tout ça, le fameux « tout ça » d’avant « tout le
reste ». J’adorerai traverser à nouveau les problèmes que j’avais alors. Credo ou la chronique de comme nous
étions beaux et heureux en ces temps révolus.