dimanche, octobre 27, 2019

L'homme sans autre qualité - chapitre 23

Le Renard - Der Alte

Il est rentré de Berlin. Je suis rentré de Berlin, un séjour de plus, visite à la Berlinische Galerie, Hasir où, apparemment, j’ai mes habitudes, visites à Li., dîner avec cette dernière et Frau Dr. von J., sa mère ; un peu d’amusement ; la musique de la ville, sa magie. Et tout est dit. Il est rentré en vrac et soulagé, de la peine à dire « je », cette identité qui n’a pas plus d’existence dans un texte que l’évocation d’un éléphant rose ou le récit de l’un ces songes si réalistes, mon Oméga, le pays d’ailleurs que je visite encore, parfois, avec moins de régularité. J’ai reçu un message d’ un autre éditeur, voir les détails de la publication de « La lumière des Césars », mon odyssée limite délirante à travers les couloirs d’une autre possibilité. Une otite me bave à travers l’oreille droite, j’entends des choses, le crépitement insistant d’un incendie qui bouronne. Je ne serai pas le moins du monde étonné lorsque les flammes jailliront. Excellente excuse pour ne rien faire et regarder toute les séries policières franchouilles, britouilles et teutonnes que diffusent une bonne quinzaine de chaînes … indigentes pour la plupart. J’aime le cliché du/de la commissaire, tics et manies, et le monde de tous les jours en toile de fond. J’ai peut-être eu un trouble schizoïde à force de rester collé derrière le petit écran ? Entre « Le Renard » et « Poirot », je sors les petits chiens, me traîner dehors parmi cet été qui commence à prendre du plomb dans l’aile. Il faut en profiter … parce que sous peu, il doit reprendre le chemin du boulot. Ni agent de sécurité, ni flic, ni marchand d’art ou retraité : il enseigne ! Configuration plutôt classique pour un auteur ; il est loin le temps quand la littérature nourrissait son homme.

Je suis de retour, pour de bon, à peine abasourdi par trois-quatre mois d’absence ? deux ans ? dix ans ? absence à moi-même. J’ai durant tout ce temps, agi de manière tout à fait normale, « en pilote automatique ». J’ai mis des chaussettes, me suis brossé les dents et ai même exercé des activités pédagogisantes à caractère lucratif. J’avais déjà « débloqué » dans le genre durant mon enfance, mon adolescence. Je me rappelle qu’on me trouvait déjà bizarre. Je suis allé trouver un ORL pour mon conduit auditif droit en plein marasme, vraisemblablement la porte par laquelle je suis passé …

Intrication et non-localité, mes nouveaux mots d’ordre, à moins que je ne sois dans l’état du chat de Schrödinger, vivant et mort à la fois ?! Normalement, il nous arrive des trucs qui tombent d’on ne sait où, « la faute à la fatalité » selon le bon mot de Charles Bovary à propos de la mort d’Emma. Je sait qu’il s’agit d’un état d’équilibre. Comme deux particules qui se rencontrent ? s’intriquent ? s’emboîtent ? existant l’une par l’autre. Si l’une est rouge, l’autre est verte ; si l’une devient verte, l’autre vire au rouge. Pourquoi en ai-je conscience ? pourquoi la dyslexie ? pourquoi une conformation du système nerveux selon un schéma autistique Asperger ? On va dire qu’il s’agit de mon « petit » talent. On s’est bien occupé de moi durant mon absence, j’aurai pu me retrouver en plus mauvais état. Je découvre tous les jours qui je suis et le  nombre d’activités à la c… dans lesquelles je me suis investi. A croire que je craignais de ne pas exister en dehors de ces activités. Disons que tout cela est le résultat de mes choix.

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