jeudi, août 09, 2018

"Parcours" de Jacques Dubochet


Nous ne sommes pas du même bord politique, nous n’intervenons pas forcément sur les mêmes points au Conseil Communal mais c’est avec un plaisir sincère que j’ai officiellement salué notre prix Nobel au début de notre séance du mercredi 6 décembre 2017. J’ai, par la suite, eu le plaisir encore plus grand de le voir vêtu d’un frac ! Habituellement, notre homme donne plutôt dans le look père Noël en chemise hawaïenne. Cela m’a beaucoup touché qu’il m’offre un exemplaire de « Parcours », son essai autobiographique scientifique fourre-tout. Le texte est sympa, comme l’auteur, échevelé, comme souvent l’auteur, drôle, pertinent, optimiste, toujours comme l’auteur et, indépendamment de la volonté de l’auteur, un rien aveugle sur certaines choses. On mettra ça sur le compte de l’optimisme.

Jacques Dubochet est un excellent vulgarisateur, il s’intéresse à plus d’un domaine hors de sa zone de confort, il fait l’effort de débrouiller ce qui lui paraît obscur et, du coup, devient à son tour une référence ressource pour ses lecteurs. L’éthique dans les sciences, la génétique, le changement climatique sont des sujets à propos desquels notre illustre Morgien réfléchit, beaucoup, et construit une opinion personnelle argumentée à valeur universelle. L’auteur possède son style fait de ruptures, d’humour, d’à-coups et d’une syntaxe décontractée ; c’est une voix et on aimerait l’écouter encore plus longuement dans ses recensions scientifiques, ça ferait une excellente rubrique dans la presse locale – pour une fois que l’on y lirait quelque chose d’intelligent qui ne chlipote pas la plus grossière des manœuvres politiques – bref, ce serait faire œuvre d’éveil public.

« Parcours » traite aussi du … parcours de son auteur. Ce dernier l’admet, il a eu de la chance, c’est toujours une grande chance de naître dans une famille éduquée, sensée, sans problème financier… Ça vous change la perspective. Jacques Dubochet  a même réussi à faire de sa dyslexie un atout, il l’avoue. Il a eu la chance d’être « tombé » sur les bons enseignants. J’en connais qui, grandis dans des clapiers moisis, quartier de prolos, n’ont fréquenté que les écoles primaires et secondaires de prolos avec, il va sans dire, l’enseignement assorti et qui n’ont jamais pu jouer de l’excuse avérée ou non d’une dys-je-ne-sais-trop-quoi-ie. Personnellement, j’ai découvert il y a peu que j’étais dysorthographique si ce n’est dyslexique ce qui expliquerait pas mal de choses. Enfin, les prolos qui n’ont pas de chance, les HLM de lapins et l’éducation publique à l’avenant, ce n’est pas chez nous, ce n’est pas à Morges, ça se saurait … Tenez, la preuve, même sans avoir été correctement diagnostiqué j’ai réussi à devenir président du Conseil Communal. Bref, les chats ne font pas de chiens et les socialistes ne font pas d’UDC.

Revenons à l’angle mort, une certaine vision d’une réforme écologique qui se trompe d’étage. Oui, les histoires d’empreinte carbone, de surconsommation des ressources, de développement durable et autres sont de première importance mais il faut regarder le problème dans son ensemble avec un rien de distance. Le climat a toujours changé, l’activité humaine n’est qu’un facteur, aggravant diront certains, l’historien vous dit qu’il y a des cycles et que chaque problème appelle une solution, et le problème, en l’occurrence, s’appelle surpopulation ! Pour revenir aux susmentionnés lapins, il faudrait peut-être arrêter de se multiplier. Quelle est l’empreinte carbone de chaque nouvelle vie ? Il faut que le consommateur soit responsable et pourquoi cette exigence de responsabilité ne s’étend-elle pas aux géniteurs/trices ? Notre économie saurait très bien faire avec une main d’œuvre de robots pour une production durable de qualité destinée à une population appelée à diminuer à terme. Evidemment, ça ne fait pas le jeu de la finance, de ses promesses à courte visée et de son modèle basé sur une croissance perpétuelle. Il faut rompre avec la pression sociale qui veut qu’une vie de couple aboutie donne du fruit, une descendance ! Et si vous tenez absolument à transmettre votre nom, adoptez, il y a bien assez d’orphelins malheureux dans les pays en voie de développement. Ce droit impérieux à « avoir des enfants » à tout prix se fait au détriment de notre avenir commun. 7,55 milliards d’individus humains sur terre au 1er juillet 2017 ! Je n’ose imaginer à combien s’élève ce chiffre aujourd’hui. Pour qu’un individu humain puisse devenir un être humain, il a besoin de minimas : attention, éducation, espace, projets, avenir. Sans cela, on oscille entre le bout de viande et la machine, une machine en viande, berk.

« Parcours » ou un chemin de réflexion pour son lecteur.


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