mardi, août 18, 2015

"Rondo Veneziano", extrait du "Cahier vert", retour de croisière

Autour de la piscine, au restaurant, sur les coursives, dans les bars, au théâtre du navire, partout, l’affront de la jeunesse, 15-25 ans à peu près, un peu plus. Des garçons poseurs, préoccupés de leur propre pose, et paradoxalement resplendissant ; des garçons bruns, châtains, bien faits, bronzés, élégants, séduisants. On ne brille pas de cette manière avec son cerveau, ou sa culture. Ces garçons vont si bien avec la mer, l’horizon, le ciel et la décoration un peu vulgaire du « Musica », décoration parfaitement identique à celle des autres navires d’une catégorie identique de la flotte MSC.

Bon nombre de ces merveilleux garçons occupaient le pont supérieur bâbord, lors de la sortie du port de Venise. Ils étaient perdus parmi la masse des croisièristes photographiant à qui mieux mieux la Sérénissime en contrebas. Je me tenais parmi cette foule, au second rang, encombré d’une tasse de thé. Le bateau s’est dirigé sur la Giudecca , l’a dépassée, puis a contourné Saint-Marc avant de filer vers le large et quelques îles que je n’ai pas su reconnaître. J’ai été frappé par l’inclinaison marquée, voire dangereuse de plus d’un clocher.


La ville était belle, attirante, intrigante, souvenir de « La Mort à Venise », évidemment, forcément et souvenir d’une conversation facebookienne récente au cours de laquelle je disais mon peu d’admiration pour la cité des doges, noyées sous le tourisme de masse et l’aqua-alta, comme une célèbre courtisane dans le coma après un AVC et néanmoins entreprise par des cohortes de touristes asiatiques au milieu de son incontinence. Je ne retire rien à mon jugement ; je relève in petto que, si j’en avais le temps, j’ « entreprendrai », moi aussi, volontiers la comateuse. Les passagers – mes compagnons – de ce HLM flottant agitaient joyeusement la main en signe d’au revoir à l’attention des fourmis humaines cheminant tout en bas ou empilées dans les vaporetti. Seuls leurs répondaient d’autres touristes alors que les Vénitiens tentaient de faire mine de ne pas voir cette espèce d’orque obèse de trois-cents mètres sur trente (maître-bau), sur soixante, à vue de nez, animal contre-nature au sommet duquel je me tenais avec quelques centaines d’autres, Cy. et ses parents ; ces derniers un peu plus en retrait du bastingage, à l’ombre.  

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