lundi, janvier 13, 2014

"Musique dans la Karl Johan Strasse", extrait 3


Cathédrale de Beauvais par Henri le Sidaner, 1900 

Beauvais,  la cathédrale Saint-Pierre au crépuscule, diaphane, dorée, miraculeuse au bout d’une étroite rue, la rue Feutrier, la façade ouest du transept, la douceur d’une fin de journée estivale telle que la représente Henri Le Sidaner en 1900, exposition « L’idéal Art Nouveau », au Palais Lumière, Evian. Une brève escapade de quelques heures « à l’étranger » ; une brève escapade de quelques heures dans mes territoires passés, mon ex-francophilie, le souvenir de ma vie à vingt ans, le plaisir d’un peu d’art, rien de dérangeant, idéal balnéaire, Maurice Denis (1870-1943), dix, quinze, vingt ans après « Musique dans la Karl Johan Strasse », à croire que l’artiste essaie d’y croire, les dernières vacances avant la catastrophe. La vasque de la villa Médicis dispense sa fraîcheurs et son clapotis, la ville éternelle au-delà de la terrasse ; une colonie de vacances à Trégastel, sous la gouverne de bonnes sœurs en cornettes éclatantes, un après-midi clair, ou le goûter dans un intérieur simple mais la belle lumière d’une fenêtre. Il y aussi Honfleur, un sentier sous les arbres, le village en contrebas, la villégiature estivale de Vallotton, je verrai cela la semaine prochaine, une fugue d’un weekend.
            L’hiver existe-t-il dans l’Art Nouveau ? voir « La Neige » (1913), de Maurice Boudot-Lamotte (1878-1958). S’agit-il encore d’Art Nouveau avec ce paysage de banlieue en gris, brume, neige et fumées (train et usines pour cette denière). Les voies sont à peine marquées en sale dans la neige et derrière un maigre bosquet luit un regard orange, les phares de la locomotive. Tout semble brouillé par le froid et la suie. Nostalgie ? Inquiétude ? Torpeur ! rester encore un peu dans un demi-sommeil, prolonger « l’âge d’or ».
            Je reviens encore à la cathédrale de Beauvais, la toile du Sidaner, la douceur des tons, l’onctuosité du pinceau, la maîtrise élégante de la technique, la profonde paix de l’instant, captée par l’artiste, rendue par la toile. Entre promesses perdues et joie de retrouver ce qui est passé.

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