samedi, décembre 28, 2013

Wien Berlin, Berlinische Galerie



Troisième extrait de « Musique dans la Karl-Johan Strasse », autofiction en cours de rédaction.

"Mädchen mit Hut", Franz Lerch, 1929
Le portrait de Johanna Straude, par Klimt, une œuvre de la débâcle (1917/18), et pourtant un regard clair, une tenue, une élégance moderne intemporelle. Exposition Wien Berlin, à la Berlinische Galerie. Il y a cette folle de Baladine Klossowska à côté, la mère de Balthus, par son frère Eugen Spiro en 1901 ; un homme nu en face, une toile de Kolo Moser, de l’authentique néo-Hodler. L’homme nu est musclé, solide, dessiné, il avance la tête baissée, il regarde son sexe ?! Je surprends mon reflet dans la glace d’une vitrine. J’aurais dû mettre une cravate, j’ai une coupe de cheveux qui n’est pas sans rappeler celle des modèles, la coupe dite allemande, courte et structurée. J’aimerais avoir sur le temps, l’époque, le regard lassé et distant d’Elisabeth Bergner, un portrait par Emil Orlik (1925). Elle se tient de profil, la tête rejetée en arrière, le buste de trois-quarts face, un teint de rêve, certainement obtenu grâce aux miracles d’un maquillage adroit. L’inquiétude du regard de Schönberg par Max Oppenheimer, en 1909, son crâne d’œuf, sa bouche mi-pincée, les yeux tournés vers la droite, il n’a apparemment pas envie de voir une Nini chatte en l’air à l’aquarelle, par ce petit bourgeois branleur d’Egon Schiele. Deux ménagères effarées, au marché, par Max Beckmann, un extrait d’une œuvre plus grande de 1914 que l’artiste a taillée en 1928. Le cynique, le désabusé a malicieusement retenu l’anecdotique, une vieille à calotte et capote tenant le bras d’une bien plus jeune, forte poitrine, grand chapeau, et les deux la bouche ouverte, stupéfaites et figées. Ce que craignait Schönberg dans la salle précédente est-il arrivé ? Un autre extrait de cette même œuvre de Beckmann, la toile est en pied et montre une famille bourgeoise en calme fuite ; l’inquiétude de monsieur est lisible, l’agacement de madame, l’insouciance des enfants, la soumission de la bonne. Un pré-Picasso par Otto Dix, 1922, à l’aquarelle, un blessé de guerre qui ressemble à Marie-Thérèse Walter. L’inquiétude de Schönberg était donc fondée. De nouveaux tourments dans le regard de Lola, en 1927/28, un portrait dans un goût hispanisant par Christian Schad, une brune aux grands yeux, un éventail à la main, un châle rouge sur les épaules, des aplats de couleur et de la moustache comme chez Frida Kahlo. Quant à Franz Lerch, il a vraisemblablement préféré fuir aux Etats-Unis (voir « Schlafendes Mädchen », 1930) afin de donner libre cours à son goût de la lumière sur un mode Hoper, ce sens américain des choses simples de la sensualité que l’on retrouve jusque chez Katz. Il faut terminer sur la « Mädchen mit Hut » de Lerch aussi, une rive en 1929, l’été, la silhouette garçonne du modèle, son regard dans l’ombre de son couvre-chef. Je quitte Berlin sous ce regard.

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