samedi, décembre 01, 2007

Poésie versus engagement


Il y a toujours cette vue sublime, le lac, les Alpes, une toile de Hodler en dépit du dépotoir architectural qui s'étale juste au-dessous, plus de cinquante ans d'urbanisme lausannois déficient et mal-inspiré. Il suffirait de raconter le ciel au coucher, tout à l'ouest, alors que la crête du Jura se découpe avec précision et que le cordon de l'avenue de Morges s'embrase, éclairage public et circulation. Il suffirait de raconter cela, les infimes modifications de ce tableau, à travers les saisons pour avoir touché ... à l'essentiel. Toutefois, le temps n'est plus aux pâmoisons pré-romantiques ni à la contemplation. Sous divers prétextes (de l'inutilité à la bienséance, à l'hygiène, la prévention de tout ce que vous voulez), des ayatollahs masqués exigent çà et là une limitation de la liberté d'expression. Il n'est donc plus temps de pleurer sous des clairs de lune !

Le dernier exemple en date : un édile cantonal ne supporte pas de voir son action critiquée dans un blog, mal écrit soit, mais en rien ordurier ni calomniateur. Faut-il rappeler au potentat politique que son action est publique, que leur personne est publique et que, donc, ils est normal d'être en butte à une critique publique. L'Etat de Vaud réclamerait la fermeture du blog ! De quel droit ? Cela n'est pas sans rappeler des méthodes "stasiesques", l'instauration d'une conspiration du silence afin de ne pas déranger le récit de la petite histoire du gentil petit pays "Y'en a point comme nous". Nous - citoyens d'adoption, de fraîche date ou de souche ancestrale - qu'avons-nous à gagner dans l'entretien de ce conte ? L'incompétence n'est pas rédhibitoire, un faux pas reste toujours excusable mais la censure d'état n'est pas acceptable. Dans le camp des magistrats, on se gargarise avec le "devoir de réserve" ? J'estime, et mes confrères auteurs aussi, que le bon fonctionnement de l'Etat est l'affaire des citoyens, qu'une plainte, ou que le mécontentement d'un service entier, est toujours recevable. A condition, soit, de ne pas dénigrer, insulter ou salir l'honneur du magistrat en cause.

Cette affaire n'est pas sans rappeler l'attitude d'un autre édile, qui lui se mure dans le silence et fait mine de ne pas avoir reçu les doléances de syndicats, preuve à l'appui, et ose clamer son incompréhension par voie de presse ! Cette dernière n'a pas les coudées franches, soit, les journaux sont nombreux en Suisse et particulièrement en terre romande. La survie de chacun dépend du bon fonctionnement du consensus, histoire que tout le monde s'y retrouve, une sorte de gentlemen agreement qui interdit les éclats sains d'un "Canard enchaîné". Pourtant, les journalistes, sans rompre les subtiles règles de cet équilibre, trouvent tout de même le moyen de faire leur travail, citent des faits, des noms. Il est donc permis d'espérer.

L'horizon s'est refermé, il pleut, le lac, les montagnes, le ciel ... Une toile grise, sale, accordée aux façades détrempées, sans grâce. Jusqu'à la saison nous engage donc à des préoccupations plus politiques.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bien d'accord... Où va-t-on si les cafés ne servent pas aux discussions de café ?